Rantings of M. Gillenormand (fr)

…belle fichue sottise! les barricades! Voyez un peu où mène le jacobisme. Je parie tout ce qu’on voudra, un million contre un fichtre, qu’il n’y avait là que des repris de justice ou des forçats libérés. Les républicains et les gallériens ça ne fait qu’un nez et qu’un mouchoir. Ah! tu es mort, drôle! Eh bien, moi aussi je vais crever et tu auras affaire à moi! oui! je crèverai, et ce sera bien fait, et tu verras! D’abord ton peuple n’en veut pas de ta république. Il n’en veut pas, il s’en burle [s’en moque] de la république, entends-tu, crétin? se faire tuer pour 93, se faire tuer pour les massacres de septembre, mais ils ne savent donc pas un mot d’histoire? Se faire tuer pour monsieur de Robespierre, se faire tuer pour Marat, se faire tuer pour la guillotine, c’est à cracher sur tous ces jeunes gens-là tant ils sont bêtes! C’est républicain, c’est romantique. Qu’est-ce que c’est que ça romantique? faites-moi l’amitié de me dire ce que c’est que ça! toutes les folies possibles! Il y a deux ans ça vous allait à Hernani! je vous demande un peu, Hernani! Des antithèses des abominations qui ne sont même pas écrites en français! Et puis on se fait écharper dans les barricades. Tels sont les brigandages de ce temps-ci.

Il ouvrit une fenêtre toute grande comme s’il étouffait, et se remit à marcher comme un homme ivre en s’étreignant le derrière de la tête de ses deux mains.

—Ces jeunes gens d’à présent, tous des chenapans! Et ceux qui ne sont pas des scélérants sont des dadais! ils font tout ce qu’ils peuvent pour être laids, ils sont mal habillés, ils ont peur de femmes, ils ont un air de mendier qui fait éclater de rire les Jeannetons, ma parole d’honneur! on dirait les pauvres honteux de l’amour. Celui-ci, s’il vous plaît, était amoureux platonique de la coquine d’un lancier. Ça vous a des opinions politiques; monsieur, il devrait être défendu d’avoir des opinions politiques; ils fabriquent des systèmes, ils refont la société, ils démolissent la monarchie, ils flanquent par terre toutes les lois, ils mettent le grenier à la place de la cave et mon portier à la place du roi, ils bousculent l’Europe de fond en comble, ils rebâtissent le monde et ils ont pour bonnes fortunes de regarder sournoisement les jambes des blanchisseuses qui remontent dans leurs charrettes. Ah! juste ciel! tu pourras te vanter d’avoir tué ton grand-père, toi!

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