La Cougourde (c’est-à-dire la Courge) d’Aix qui « s’ébauchait » devait avoir encore fort peu de membres. Elle en compta environ quatre-vingts sous la Monarchie de Juillet, son président s’appelait alors Prives, elle était « la plus avancée » des sociétés républicaines des Bouches-du-Rhône.
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Autour de Courfeyrac qui avait toutes les qualités d’un centre, la rondeur et la rayonnement, se trouvaient plusieurs jeunes gens qui, comme on le verra plus tard, avaient, en outre, un autre lien : Combeferre, qualifié le rageur; Joly, dit Jolly; Grangé qui signait de ce rebus G.; Enjolras, froid, fanatique et triste, avec un teint de femme, un sourire de vierge et les plus doux yeux bleus qu’il y eût au monde; enfin Lègle, qui était de Meaux, et qu’on appelaitBossuet. Excepté Bossuet, tous étaient du Midi.
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Sans doute est-ce à Enjolras, que Victor Hugo, dans une note retrouvée, fait tenir le propos suivant:
« Il s’écria:
« Vive la France! il n’y a que la France! L’Espagne est un froc, l’Italie est un linceul. Londres, c’est de l’ennui bâti; la monarchie russe, c’est l’hiver fait gouvernement. »
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La chanson de Combeferre ( j’aime mieux ma mère ) est un souvenir de la chanson que chante Alceste au nez d’Oronte, dans le Misanthrope (Ac. I. sc. II):
Si le roi m’avait donné
Paris sa grand’ville
Et qu’il me fallût quitter
L’amour de ma mie,
Je dirais au roi Henri:
« Reprenez votre Paris
J’aime mieux ma mie, ô gué!
J’aime mieux ma mie. »
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Les paroles de Grantaire, qui forment deux vers, sont dans la chanson même de Vive Henri IV, que Collé composa pour sa comédie la Partie de chasse d’Henri IV. Voici d’ailleurs tout le joyeux quatrain:
J’aimons les filles
Et j’aimons le bon vin
De nos bons drilles
Voilà tout le refrain.
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Un autre plan du chapitre où Marius fait la connaissance des Amis de l’ABC:
Courfeyrac, sur la porte, voit un cabriolet passer sur la place, au pas, et comme indcis. Tiens! pourquoi ce cabriolet va-t-il au pas? Il y regarde et croit reconnaître un visage.
—Monsieur?
—Plaît-il?
—N’est-ce pas vous qu’on appelle Marius Pontmercy?
—Oui.
—Eh bien, je suis du même cours que vous. Il y a trois jours on a fait l’appel, et on vous a marqué absent. Vous savez qu’ils sont rigides maintenant, et qu’après trois absences on raye l’inscription. Quant à moi cela m’est égal, je n’y vais jamais. On me raye mon inscription, mais je suis toujours étudiant. J’ai été renseigné sur votre appel par un ami qui est dans le café.
—Merci, monsieur.
—Je m’appelle Courfeyrac. Où logez-vous?
—Dans ce cabriolet.
—Bah!
—Je suis dans la rue pour l’instant. C’est une histoire comme cela. Je ne sais où aller.
—Venez chez moi, dit Courfeyrac.
Marius descendit et entra dans le café.
—Je vais vous présenter aux amis, dit Courfeyrac.
—Quels sont les amis?
—Regardez et vous verrez, écoutez et vous entendrez.
Marius entra dans la salle réservée. Tous y parlaient et semblaient discuter avec chaleur. Mais avant que Courfeyrac eût pu prononcer un mot et présenter Marius, E…, voyant un étranger, avait froncé le sourcil et fait un signe. Tous se retournèrent vers le nouveau venu. Marius écouta selon l’indication de Courfeyrac, et voici ce qu’il entendit:
—(Ici la partie de dominos.)
Marius n’avait pas consenti à encombrer la chambre de Courfeyrac, mais s’était logé au même hôtel que lui, le trouvant cordial. Le lendemain conversation sur les ressources. —Le surlendemain sur la politique.
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Dans le chapitre III, après les mots « au devant de Courfeyrac », le texte des Misères est:
Tiens! dit Laigle de Meaux, tu vas t’enrhumer. Pas de parapluie!
Courfeyrac haussa les épaules. L’école romantique, dont il était, a toujours haï et méprisé les parapluies.
—Un parapluie, fit-il, jamais! plutôt la mort!
—Tu as tort, dit Bossuet, c’est élégant. Tu ne connais donc pas le grand chic anglais, un immense riflard?
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