Volume 2/Book 3/Chapter 4

From Les Misérables Annotation Project
Jump to: navigation, search

Les Misérables, Volume 2: Cosette, Book Third: Accomplishment of the Promise Made to the Dead Woman, Chapter 4: Entrance on the Scene of a Doll (Tome 2: Cosette, Livre troisième: Accomplissement de la promesse faite à la morte, Chapitre 4: Entrée en scène d'une poupée)

General notes on this chapter[edit]

French text[edit]

La file de boutiques en plein vent qui partait de l'église se développait, on s'en souvient, jusqu'à l'auberge Thénardier. Ces boutiques, à cause du passage prochain des bourgeois allant à la messe de minuit, étaient toutes illuminées de chandelles brûlant dans des entonnoirs de papier, ce qui, comme le disait le maître d'école de Montfermeil attablé en ce moment chez Thénardier, faisait «un effet magique». En revanche, on ne voyait pas une étoile au ciel.

La dernière de ces baraques, établie précisément en face de la porte des Thénardier, était une boutique de bimbeloterie, toute reluisante de clinquants, de verroteries et de choses magnifiques en fer-blanc. Au premier rang, et en avant, le marchand avait placé, sur un fond de serviettes blanches, une immense poupée haute de près de deux pieds qui était vêtue d'une robe de crêpe rose avec des épis d'or sur la tête et qui avait de vrais cheveux et des yeux en émail. Tout le jour, cette merveille avait été étalée à l'ébahissement des passants de moins de dix ans, sans qu'il se fût trouvé à Montfermeil une mère assez riche, ou assez prodigue, pour la donner à son enfant. Éponine et Azelma avaient passé des heures à la contempler, et Cosette elle-même, furtivement, il est vrai, avait osé la regarder.

Au moment où Cosette sortit, son seau à la main, si morne et si accablée qu'elle fût, elle ne put s'empêcher de lever les yeux sur cette prodigieuse poupée, vers la dame, comme elle l'appelait. La pauvre enfant s'arrêta pétrifiée. Elle n'avait pas encore vu cette poupée de près. Toute cette boutique lui semblait un palais; cette poupée n'était pas une poupée, c'était une vision. C'étaient la joie, la splendeur, la richesse, le bonheur, qui apparaissaient dans une sorte de rayonnement chimérique à ce malheureux petit être englouti si profondément dans une misère funèbre et froide. Cosette mesurait avec cette sagacité naïve et triste de l'enfance l'abîme qui la séparait de cette poupée. Elle se disait qu'il fallait être reine ou au moins princesse pour avoir une «chose» comme cela. Elle considérait cette belle robe rose, ces beaux cheveux lisses, et elle pensait: Comme elle doit être heureuse, cette poupée-là! Ses yeux ne pouvaient se détacher de cette boutique fantastique. Plus elle regardait, plus elle s'éblouissait. Elle croyait voir le paradis. Il y avait d'autres poupées derrière la grande qui lui paraissaient des fées et des génies. Le marchand qui allait et venait au fond de sa baraque lui faisait un peu l'effet d'être le Père éternel.

Dans cette adoration, elle oubliait tout, même la commission dont elle était chargée. Tout à coup, la voix rude de la Thénardier la rappela à la réalité:—Comment, péronnelle, tu n'es pas partie! Attends! je vais à toi! Je vous demande un peu ce qu'elle fait là! Petit monstre, va!

La Thénardier avait jeté un coup d'œil dans la rue et aperçu Cosette en extase.

Cosette s'enfuit emportant son seau et faisant les plus grands pas qu'elle pouvait.


English text[edit]

The line of open-air booths starting at the church, extended, as the reader will remember, as far as the hostelry of the Thenardiers. These booths were all illuminated, because the citizens would soon pass on their way to the midnight mass, with candles burning in paper funnels, which, as the schoolmaster, then seated at the table at the Thenardiers' observed, produced "a magical effect." In compensation, not a star was visible in the sky.

The last of these stalls, established precisely opposite the Thenardiers' door, was a toy-shop all glittering with tinsel, glass, and magnificent objects of tin. In the first row, and far forwards, the merchant had placed on a background of white napkins, an immense doll, nearly two feet high, who was dressed in a robe of pink crepe, with gold wheat-ears on her head, which had real hair and enamel eyes. All that day, this marvel had been displayed to the wonderment of all passers-by under ten years of age, without a mother being found in Montfermeil sufficiently rich or sufficiently extravagant to give it to her child. Eponine and Azelma had passed hours in contemplating it, and Cosette herself had ventured to cast a glance at it, on the sly, it is true.

At the moment when Cosette emerged, bucket in hand, melancholy and overcome as she was, she could not refrain from lifting her eyes to that wonderful doll, towards the lady, as she called it. The poor child paused in amazement. She had not yet beheld that doll close to. The whole shop seemed a palace to her: the doll was not a doll; it was a vision. It was joy, splendor, riches, happiness, which appeared in a sort of chimerical halo to that unhappy little being so profoundly engulfed in gloomy and chilly misery. With the sad and innocent sagacity of childhood, Cosette measured the abyss which separated her from that doll. She said to herself that one must be a queen, or at least a princess, to have a "thing" like that. She gazed at that beautiful pink dress, that beautiful smooth hair, and she thought, "How happy that doll must be!" She could not take her eyes from that fantastic stall. The more she looked, the more dazzled she grew. She thought she was gazing at paradise. There were other dolls behind the large one, which seemed to her to be fairies and genii. The merchant, who was pacing back and forth in front of his shop, produced on her somewhat the effect of being the Eternal Father.

In this adoration she forgot everything, even the errand with which she was charged.

All at once the Thenardier's coarse voice recalled her to reality: "What, you silly jade! you have not gone? Wait! I'll give it to you! I want to know what you are doing there! Get along, you little monster!"

The Thenardier had cast a glance into the street, and had caught sight of Cosette in her ecstasy.

Cosette fled, dragging her pail, and taking the longest strides of which she was capable.

Translation notes[edit]

Textual notes[edit]

Citations[edit]