Volume 4/Book 14/Chapter 3
Les Misérables, Volume 4: The Idyll of the Rue Plumet & The Epic of the Rue Saint-Denis, Book Fourteenth: The Grandeurs of Despair, Chapter 3: Gavroche would have done better to accept Enjolras' Carbine
(Tome 4: L'idylle rue Plumet et l'épopée rue Saint-Denis, Livre quatorzième: Les grandeurs du désespoir, Chapitre 3: Gavroche aurait mieux fait d'accepter la carabine d'Enjolras)
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General notes on this chapter
French text
On jeta sur le père Mabeuf un long châle noir de la veuve Hucheloup. Six hommes firent de leurs fusils une civière, on y posa le cadavre, et on le porta, têtes nues, avec une lenteur solennelle, sur la grande table de la salle basse.
Ces hommes, tout entiers à la chose grave et sacrée qu'ils faisaient, ne songeaient plus à la situation périlleuse où ils étaient.
Quand le cadavre passa près de Javert toujours impassible, Enjolras dit à l'espion:
—Toi! tout à l'heure.
Pendant ce temps-là, le petit Gavroche, qui seul n'avait pas quitté son poste et était resté en observation, croyait voir des hommes s'approcher à pas de loup de la barricade. Tout à coup il cria:
—Méfiez-vous!
Courfeyrac, Enjolras, Jean Prouvaire, Combeferre, Joly, Bahorel, Bossuet, tous sortirent en tumulte du cabaret. Il n'était déjà presque plus temps. On apercevait une étincelante épaisseur de bayonnettes ondulant au-dessus de la barricade. Des gardes municipaux de haute taille, pénétraient, les uns en enjambant l'omnibus, les autres par la coupure, poussant devant eux le gamin qui reculait, mais ne fuyait pas.
L'instant était critique. C'était cette première redoutable minute de l'inondation, quand le fleuve se soulève an niveau de la levée et que l'eau commence à s'infiltrer par les fissures de la digue. Une seconde encore, et la barricade était prise.
Bahorel s'élança sur le premier garde municipal qui entrait et le tua à bout portant d'un coup de carabine; le second tua Bahorel d'un coup de bayonnette. Un autre avait déjà terrassé Courfeyrac qui criait: «À moi!» Le plus grand de tous, une espèce de colosse, marchait sur Gavroche la bayonnette en avant. Le gamin prit dans ses petits bras l'énorme fusil de Javert, coucha résolûment en joue le géant, et lâcha son coup. Rien ne partit. Javert n'avait pas chargé son fusil. Le garde municipal éclata de rire et leva la bayonnette sur l'enfant.
Avant que la bayonnette eût touché Gavroche, le fusil échappait des mains du soldat, une balle avait frappé le garde municipal au milieu du front et il tombait sur le dos. Une seconde balle frappait en pleine poitrine l'autre garde qui avait assailli Courfeyrac, et le jetait sur le pavé.
C'était Marius qui venait d'entrer dans la barricade.
English text
They threw a long black shawl of Widow Hucheloup's over Father Mabeuf. Six men made a litter of their guns; on this they laid the body, and bore it, with bared heads, with solemn slowness, to the large table in the tap-room.
These men, wholly absorbed in the grave and sacred task in which they were engaged, thought no more of the perilous situation in which they stood.
When the corpse passed near Javert, who was still impassive, Enjolras said to the spy:—
"It will be your turn presently!"
During all this time, Little Gavroche, who alone had not quitted his post, but had remained on guard, thought he espied some men stealthily approaching the barricade. All at once he shouted:—
"Look out!"
Courfeyrac, Enjolras, Jean Prouvaire, Combeferre, Joly, Bahorel, Bossuet, and all the rest ran tumultuously from the wine-shop. It was almost too late. They saw a glistening density of bayonets undulating above the barricade. Municipal guards of lofty stature were making their way in, some striding over the omnibus, others through the cut, thrusting before them the urchin, who retreated, but did not flee.
The moment was critical. It was that first, redoubtable moment of inundation, when the stream rises to the level of the levee and when the water begins to filter through the fissures of dike. A second more and the barricade would have been taken.
Bahorel dashed upon the first municipal guard who was entering, and killed him on the spot with a blow from his gun; the second killed Bahorel with a blow from his bayonet. Another had already overthrown Courfeyrac, who was shouting: "Follow me!" The largest of all, a sort of colossus, marched on Gavroche with his bayonet fixed. The urchin took in his arms Javert's immense gun, levelled it resolutely at the giant, and fired. No discharge followed. Javert's gun was not loaded. The municipal guard burst into a laugh and raised his bayonet at the child.
Before the bayonet had touched Gavroche, the gun slipped from the soldier's grasp, a bullet had struck the municipal guardsman in the centre of the forehead, and he fell over on his back. A second bullet struck the other guard, who had assaulted Courfeyrac in the breast, and laid him low on the pavement.
This was the work of Marius, who had just entered the barricade.