Volume 3/Book 3/Chapter 2
Les Misérables, Volume 3: Marius, Book Third: The Grandfather and the Grandson, Chapter 2: One of the Red Spectres of that Epoch
(Tome 3: Marius, Livre troisième: Le grand-père et le petit-fils, Chapitre 2: Un des spectres rouges de ce temps-là)
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General notes on this chapter
French text
Quelqu'un qui aurait passé à cette époque dans la petite ville de Vernon et qui s'y serait promené sur ce beau pont monumental auquel succédera bientôt, espérons-le, quelque affreux pont en fil de fer, aurait pu remarquer, en laissant tomber ses yeux du haut du parapet, un homme d'une cinquantaine d'années coiffé d'une casquette de cuir, vêtu d'un pantalon et d'une veste de gros drap gris, à laquelle était cousu quelque chose de jaune qui avait été un ruban rouge, chaussé de sabots, hâlé par le soleil, la face presque noire et les cheveux presque blancs, une large cicatrice sur le front se continuant sur la joue, courbé, voûté, vieilli avant l'âge, se promenant à peu près tous les jours, une bêche et une serpe à la main, dans un de ces compartiments entourés de murs qui avoisinent le pont et qui bordent comme une chaîne de terrasses la rive gauche de la Seine, charmants enclos pleins de fleurs desquels on dirait, s'ils étaient beaucoup plus grands: ce sont des jardins, et, s'ils étaient un peu plus petits: ce sont des bouquets. Tous ces enclos aboutissent par un bout à la rivière et par l'autre à une maison. L'homme en veste et en sabots dont nous venons de parler habitait vers 1817 le plus étroit de ces enclos et la plus humble de ces maisons. Il vivait là seul, et solitaire, silencieusement et pauvrement, avec une femme ni jeune, ni vieille, ni belle, ni laide, ni paysanne, ni bourgeoise, qui le servait. Le carré de terre qu'il appelait son jardin était célèbre dans la ville pour la beauté des fleurs qu'il y cultivait. Les fleurs étaient son occupation.
À force de travail, de persévérance, d'attention et de seaux d'eau, il
avait réussi à créer après le créateur, et il avait inventé de certaines
tulipes et de certains dahlias qui semblaient avoir été oubliés par la
nature. Il était ingénieux; il avait devancé Soulange Bodin dans la
formation des petits massifs de terre de bruyère pour la culture des
rares et précieux arbustes d'Amérique et de Chine. Dès le point du jour,
en été, il était dans ses allées, piquant, taillant, sarclant, arrosant,
marchant au milieu de ses fleurs avec un air de bonté, de tristesse et
de douceur, quelquefois rêveur et immobile des heures entières, écoutant
le chant d'un oiseau dans un arbre, le gazouillement d'un enfant dans
une maison, ou bien les yeux fixés au bout d'un brin d'herbe sur quelque
goutte de rosée dont le soleil faisait une escarboucle. Il avait une
table fort maigre, et buvait plus de lait que de vin. Un marmot le
faisait céder, sa servante le grondait. Il était timide jusqu'à sembler
farouche, sortait rarement, et ne voyait personne que les pauvres qui
frappaient à sa porte et son curé, l'abbé Mabeuf, bon vieux homme.
Pourtant si des habitants de la ville ou des étrangers, les premiers
venus, curieux de voir ses tulipes et ses roses, venaient sonner à sa
petite maison, il ouvrait sa porte en souriant. C'était le brigand de la
Loire.
Quelqu'un qui, dans le même temps, aurait lu les mémoires militaires,
les biographies, le Moniteur et les bulletins de la grande Armée,
aurait pu être frappé d'un nom qui y revient assez souvent, le nom de
Georges Pontmercy. Tout jeune, ce Georges Pontmercy était soldat au
régiment de Saintonge. La Révolution éclata. Le régiment de Saintonge
fit partie de l'armée du Rhin. Car les anciens régiments de la monarchie
gardèrent leurs noms de province, même après la chute de la monarchie,
et ne furent embrigadés qu'en 1794. Pontmercy se battit à Spire, à
Worms, à Neustadt, à Turkheim, à Alzey, à Mayence où il était des deux
cents qui formaient l'arrière-garde de Houchard. Il tint, lui douzième,
contre le corps du prince de Hesse, derrière le vieux rempart
d'Andernach, et ne se replia sur le gros de l'armée que lorsque le canon
ennemi eut ouvert la brèche depuis le cordon du parapet jusqu'au talus
de plongée. Il était sous Kléber à Marchiennes et au combat du
Mont-Palissel où il eut le bras cassé d'un biscaïen. Puis il passa à la
frontière d'Italie, et il fut un des trente grenadiers qui défendirent
le col de Tende avec Joubert. Joubert en fut nommé adjudant-général et
Pontmercy sous-lieutenant. Pontmercy était à côté de Berthier au milieu
de la mitraille dans cette journée de Lodi qui fit dire à Bonaparte:
Berthier a été canonnier, cavalier et grenadier. Il vit son ancien
général Joubert tomber à Novi, au moment où, le sabre levé, il criait:
«En avant!» Ayant été embarqué avec sa compagnie pour les besoins de la
campagne dans une péniche qui allait de Gênes à je ne sais plus quel
petit port de la côte, il tomba dans un guêpier de sept ou huit voiles
anglaises. Le commandant génois voulait jeter les canons à la mer,
cacher les soldats dans l'entre-pont et se glisser dans l'ombre comme
navire marchand. Pontmercy fit frapper les couleurs à la drisse du mât
de pavillon, et passa fièrement sous le canon des frégates britanniques.
À vingt lieues de là, son audace croissant, avec sa péniche il attaqua
et captura un gros transport anglais qui portait des troupes en Sicile,
si chargé d'hommes et de chevaux que le bâtiment était bondé jusqu'aux
hiloires. En 1805, il était de cette division Malher qui enleva
Günzbourg à l'archiduc Ferdinand. À Weltingen, il reçut dans ses bras,
sous une grêle de balles, le colonel Maupetit blessé mortellement à la
tête du 9ème dragons. Il se distingua à Austerlitz dans cette admirable
marche en échelons faite sous le feu de l'ennemi. Lorsque la cavalerie
de la garde impériale russe écrasa un bataillon du 4ème de ligne,
Pontmercy fut de ceux qui prirent la revanche et qui culbutèrent cette
garde. L'empereur lui donna la croix. Pontmercy vit successivement faire
prisonniers Wurmser dans Mantoue, Mélas dans Alexandrie, Mack dans Ulm.
Il fit partie du huitième corps de la grande Armée que Mortier
commandait et qui s'empara de Hambourg. Puis il passa dans le 55ème de
ligne qui était l'ancien régiment de Flandre. À Eylau, il était dans le
cimetière où l'héroïque capitaine Louis Hugo, oncle de l'auteur de ce
livre, soutint seul avec sa compagnie de quatrevingt-trois hommes,
pendant deux heures, tout l'effort de l'armée ennemie. Pontmercy fut un
des trois qui sortirent de ce cimetière vivants. Il fut de Friedland.
Puis il vit Moscou, puis la Bérésina, puis Lutzen, Bautzen, Dresde,
Wachau, Leipsick, et les défilés de Gelenhausen; puis Montmirail,
Château-Thierry, Craon, les bords de la Marne, les bords de l'Aisne et
la redoutable position de Laon. À Arnay-le-Duc, étant capitaine, il
sabra dix cosaques, et sauva, non son général, mais son caporal. Il fut
haché à cette occasion, et on lui tira vingt-sept esquilles rien que du
bras gauche. Huit jours avant la capitulation de Paris, il venait de
permuter avec un camarade et d'entrer dans la cavalerie. Il avait ce
qu'on appelait dans l'ancien régime la double-main, c'est-à-dire une
aptitude égale à manier, soldat, le sabre ou le fusil, officier, un
escadron ou un bataillon. C'est de cette aptitude, perfectionnée par
l'éducation militaire, que sont nées certaines armes spéciales, les
dragons, par exemple, qui sont tout ensemble cavaliers et fantassins. Il
accompagna Napoléon à l'île d'Elbe. À Waterloo, il était chef d'escadron
de cuirassiers dans la brigade Dubois. Ce fut lui qui prit le drapeau du
bataillon de Lunebourg. Il vint jeter le drapeau aux pieds de
l'empereur. Il était couvert de sang. Il avait reçu, en arrachant le
drapeau, un coup de sabre à travers le visage. L'empereur, content, lui
cria: Tu es colonel, tu es baron, tu es officier de la légion
d'honneur! Pontmercy répondit: Sire, je vous remercie pour ma veuve.
Une heure après, il tombait dans le ravin d'Ohain. Maintenant
qu'était-ce que ce Georges Pontmercy? C'était ce même brigand de la
Loire.
On a déjà vu quelque chose de son histoire. Après Waterloo, Pontmercy,
tiré, on s'en souvient, du chemin creux d'Ohain, avait réussi à regagner
l'armée, et s'était traîné d'ambulance en ambulance jusqu'aux
cantonnements de la Loire.
La Restauration l'avait mis à la demi-solde, puis l'avait envoyé en
résidence, c'est-à-dire en surveillance, à Vernon. Le roi Louis XVIII,
considérant comme non avenu tout ce qui s'était fait dans les
Cent-Jours, ne lui avait reconnu ni sa qualité d'officier de la légion
d'honneur, ni son grade de colonel, ni son titre de baron. Lui de son
côté ne négligeait aucune occasion de signer le colonel baron
Pontmercy. Il n'avait qu'un vieil habit bleu, et il ne sortait jamais
sans y attacher la rosette d'officier de la légion d'honneur. Le
procureur du roi le fit prévenir que le parquet le poursuivrait pour
«port illégal de cette décoration». Quand cet avis lui fut donné par un
intermédiaire officieux, Pontmercy répondit avec un amer sourire: Je ne
sais point si c'est moi qui n'entends plus le français, ou si c'est vous
qui ne le parlez plus, mais le fait est que je ne comprends pas.—Puis
il sortit huit jours de suite avec sa rosette. On n'osa point
l'inquiéter. Deux ou trois fois le ministre de la guerre et le général
commandant le département lui écrivirent avec cette suscription: À
monsieur le commandant Pontmercy. Il renvoya les lettres non
décachetées. En ce même moment, Napoléon à Sainte-Hélène traitait de la
même façon les missives de sir Hudson Lowe adressées au général
Bonaparte. Pontmercy avait fini, qu'on nous passe le mot, par avoir
dans la bouche la même salive que son empereur.
Il y avait ainsi à Rome des soldats carthaginois prisonniers qui
refusaient de saluer Flaminius et qui avaient un peu de l'âme d'Annibal.
Un matin, il rencontra le procureur du roi dans une rue de Vernon, alla
à lui, et lui dit:—Monsieur le procureur du roi, m'est-il permis de
porter ma balafre?
Il n'avait rien, que sa très chétive demi-solde de chef d'escadron. Il
avait loué à Vernon la plus petite maison qu'il avait pu trouver. Il y
vivait seul, on vient de voir comment. Sous l'Empire, entre deux
guerres, il avait trouvé le temps d'épouser mademoiselle Gillenormand.
Le vieux bourgeois, indigné au fond, avait consenti en soupirant et en
disant: Les plus grandes familles y sont forcées. En 1815, madame
Pontmercy, femme du reste de tout point admirable, élevée et rare et
digne de son mari, était morte, laissant un enfant. Cet enfant eût été
la joie du colonel dans sa solitude; mais l'aïeul avait impérieusement
réclamé son petit-fils, déclarant que, si on ne le lui donnait pas, il
le déshériterait. Le père avait cédé dans l'intérêt du petit, et, ne
pouvant avoir son enfant, il s'était mis à aimer les fleurs.
Il avait du reste renoncé à tout, ne remuant ni ne conspirant. Il
partageait sa pensée entre les choses innocentes qu'il faisait et les
choses grandes qu'il avait faites. Il passait son temps à espérer un
œillet ou à se souvenir d'Austerlitz.
M. Gillenormand n'avait aucune relation avec son gendre. Le colonel
était pour lui «un bandit», et il était pour le colonel «une ganache».
M. Gillenormand ne parlait jamais du colonel, si ce n'est quelquefois
pour faire des allusions moqueuses à «sa baronnie». Il était
expressément convenu que Pontmercy n'essayerait jamais de voir son fils
ni de lui parler, sous peine qu'on le lui rendît chassé et déshérité.
Pour les Gillenormand, Pontmercy était un pestiféré. Ils entendaient
élever l'enfant à leur guise. Le colonel eut tort peut-être d'accepter
ces conditions, mais il les subit, croyant bien faire et ne sacrifier
que lui. L'héritage du père Gillenormand était peu de chose, mais
l'héritage de Mlle Gillenormand aînée était considérable. Cette tante,
restée fille, était fort riche du côté maternel, et le fils de sa sœur
était son héritier naturel.
L'enfant, qui s'appelait Marius, savait qu'il avait un père, mais rien
de plus. Personne ne lui en ouvrait la bouche. Cependant, dans le monde
où son grand-père le menait, les chuchotements, les demi-mots, les clins
d'yeux, s'étaient fait jour à la longue jusque dans l'esprit du petit,
il avait fini par comprendre quelque chose, et comme il prenait
naturellement, par une sorte d'infiltration et de pénétration lente, les
idées et les opinions qui étaient, pour ainsi dire, son milieu
respirable, il en vint peu à peu à ne songer à son père qu'avec honte et
le cœur serré.
Pendant qu'il grandissait ainsi, tous les deux ou trois mois, le colonel
s'échappait, venait furtivement à Paris comme un repris de justice qui
rompt son ban, et allait se poster à Saint-Sulpice, à l'heure où la
tante Gillenormand menait Marius à la messe. Là, tremblant que la tante
ne se retournât, caché derrière un pilier, immobile, n'osant respirer,
il regardait son enfant. Ce balafré avait peur de cette vieille fille.
De là même était venue sa liaison avec le curé de Vernon, M. l'abbé
Mabeuf.
Ce digne prêtre était frère d'un marguillier de Saint-Sulpice, lequel
avait plusieurs fois remarqué cet homme contemplant cet enfant, et la
cicatrice qu'il avait sur la joue, et la grosse larme qu'il avait dans
les yeux. Cet homme qui avait si bien l'air d'un homme et qui pleurait
comme une femme avait frappé le marguillier. Cette figure lui était
restée dans l'esprit. Un jour, étant allé à Vernon voir son frère, il
rencontra sur le pont le colonel Pontmercy et reconnut l'homme de
Saint-Sulpice. Le marguillier en parla au curé, et tous deux sous un
prétexte quelconque firent une visite au colonel. Cette visite en amena
d'autres. Le colonel d'abord très fermé finit par s'ouvrir, et le curé
et le marguillier arrivèrent à savoir toute l'histoire, et comment
Pontmercy sacrifiait son bonheur à l'avenir de son enfant. Cela fit que
le curé le prit en vénération et en tendresse, et le colonel de son côté
prit en affection le curé. D'ailleurs, quand d'aventure ils sont
sincères et bons tous les deux, rien ne se pénètre et ne s'amalgame plus
aisément qu'un vieux prêtre et un vieux soldat. Au fond, c'est le même
homme. L'un s'est dévoué pour la patrie d'en bas, l'autre pour la patrie
d'en haut; pas d'autre différence.
Deux fois par an, au 1er janvier et à la Saint-Georges, Marius écrivait
à son père des lettres de devoir que sa tante dictait, et qu'on eût dit
copiées dans quelque formulaire; c'était tout ce que tolérait M.
Gillenormand; et le père répondait des lettres fort tendres que l'aïeul
fourrait dans sa poche sans les lire.
English text
Any one who had chanced to pass through the little town of Vernon at this epoch, and who had happened to walk across that fine monumental bridge, which will soon be succeeded, let us hope, by some hideous iron cable bridge, might have observed, had he dropped his eyes over the parapet, a man about fifty years of age wearing a leather cap, and trousers and a waistcoat of coarse gray cloth, to which something yellow which had been a red ribbon, was sewn, shod with wooden sabots, tanned by the sun, his face nearly black and his hair nearly white, a large scar on his forehead which ran down upon his cheek, bowed, bent, prematurely aged, who walked nearly every day, hoe and sickle in hand, in one of those compartments surrounded by walls which abut on the bridge, and border the left bank of the Seine like a chain of terraces, charming enclosures full of flowers of which one could say, were they much larger: "these are gardens," and were they a little smaller: "these are bouquets." All these enclosures abut upon the river at one end, and on a house at the other. The man in the waistcoat and the wooden shoes of whom we have just spoken, inhabited the smallest of these enclosures and the most humble of these houses about 1817. He lived there alone and solitary, silently and poorly, with a woman who was neither young nor old, neither homely nor pretty, neither a peasant nor a bourgeoise, who served him. The plot of earth which he called his garden was celebrated in the town for the beauty of the flowers which he cultivated there. These flowers were his occupation.
By dint of labor, of perseverance, of attention, and of buckets of water,
he had succeeded in creating after the Creator, and he had invented
certain tulips and certain dahlias which seemed to have been forgotten by
nature. He was ingenious; he had forestalled Soulange Bodin in the
formation of little clumps of earth of heath mould, for the cultivation of
rare and precious shrubs from America and China. He was in his alleys from
the break of day, in summer, planting, cutting, hoeing, watering, walking
amid his flowers with an air of kindness, sadness, and sweetness,
sometimes standing motionless and thoughtful for hours, listening to the
song of a bird in the trees, the babble of a child in a house, or with his
eyes fixed on a drop of dew at the tip of a spear of grass, of which the
sun made a carbuncle. His table was very plain, and he drank more milk
than wine. A child could make him give way, and his servant scolded him.
He was so timid that he seemed shy, he rarely went out, and he saw no one
but the poor people who tapped at his pane and his cure, the Abbé Mabeuf,
a good old man. Nevertheless, if the inhabitants of the town, or
strangers, or any chance comers, curious to see his tulips, rang at his
little cottage, he opened his door with a smile. He was the "brigand of
the Loire."
Any one who had, at the same time, read military memoirs, biographies, the
Moniteur, and the bulletins of the grand army, would have been struck by a
name which occurs there with tolerable frequency, the name of Georges
Pontmercy. When very young, this Georges Pontmercy had been a soldier in
Saintonge's regiment. The revolution broke out. Saintonge's regiment
formed a part of the army of the Rhine; for the old regiments of the
monarchy preserved their names of provinces even after the fall of the
monarchy, and were only divided into brigades in 1794. Pontmercy fought at
Spire, at Worms, at Neustadt, at Turkheim, at Alzey, at Mayence, where he
was one of the two hundred who formed Houchard's rearguard. It was the
twelfth to hold its ground against the corps of the Prince of Hesse,
behind the old rampart of Andernach, and only rejoined the main body of
the army when the enemy's cannon had opened a breach from the cord of the
parapet to the foot of the glacis. He was under Kleber at Marchiennes and
at the battle of Mont-Palissel, where a ball from a biscaien broke his
arm. Then he passed to the frontier of Italy, and was one of the thirty
grenadiers who defended the Col de Tende with Joubert. Joubert was
appointed its adjutant-general, and Pontmercy sub-lieutenant. Pontmercy
was by Berthier's side in the midst of the grape-shot of that day at Lodi
which caused Bonaparte to say: "Berthier has been cannoneer, cavalier, and
grenadier." He beheld his old general, Joubert, fall at Novi, at the
moment when, with uplifted sabre, he was shouting: "Forward!" Having been
embarked with his company in the exigencies of the campaign, on board a
pinnace which was proceeding from Genoa to some obscure port on the coast,
he fell into a wasps'-nest of seven or eight English vessels. The Genoese
commander wanted to throw his cannon into the sea, to hide the soldiers
between decks, and to slip along in the dark as a merchant vessel.
Pontmercy had the colors hoisted to the peak, and sailed proudly past
under the guns of the British frigates. Twenty leagues further on, his
audacity having increased, he attacked with his pinnace, and captured a
large English transport which was carrying troops to Sicily, and which was
so loaded down with men and horses that the vessel was sunk to the level
of the sea. In 1805 he was in that Malher division which took Gunzberg
from the Archduke Ferdinand. At Weltingen he received into his arms,
beneath a storm of bullets, Colonel Maupetit, mortally wounded at the head
of the 9th Dragoons. He distinguished himself at Austerlitz in that
admirable march in echelons effected under the enemy's fire. When the
cavalry of the Imperial Russian Guard crushed a battalion of the 4th of
the line, Pontmercy was one of those who took their revenge and overthrew
the Guard. The Emperor gave him the cross. Pontmercy saw Wurmser at
Mantua, Melas, and Alexandria, Mack at Ulm, made prisoners in succession.
He formed a part of the eighth corps of the grand army which Mortier
commanded, and which captured Hamburg. Then he was transferred to the 55th
of the line, which was the old regiment of Flanders. At Eylau he was in
the cemetery where, for the space of two hours, the heroic Captain Louis
Hugo, the uncle of the author of this book, sustained alone with his
company of eighty-three men every effort of the hostile army. Pontmercy
was one of the three who emerged alive from that cemetery. He was at
Friedland. Then he saw Moscow. Then La Beresina, then Lutzen, Bautzen,
Dresden, Wachau, Leipzig, and the defiles of Gelenhausen; then Montmirail,
Chateau-Thierry, Craon, the banks of the Marne, the banks of the Aisne,
and the redoubtable position of Laon. At Arnay-Le-Duc, being then a
captain, he put ten Cossacks to the sword, and saved, not his general, but
his corporal. He was well slashed up on this occasion, and twenty-seven
splinters were extracted from his left arm alone. Eight days before the
capitulation of Paris he had just exchanged with a comrade and entered the
cavalry. He had what was called under the old regime, the double hand,
that is to say, an equal aptitude for handling the sabre or the musket as
a soldier, or a squadron or a battalion as an officer. It is from this
aptitude, perfected by a military education, which certain special
branches of the service arise, the dragoons, for example, who are both
cavalry-men and infantry at one and the same time. He accompanied Napoleon
to the Island of Elba. At Waterloo, he was chief of a squadron of
cuirassiers, in Dubois' brigade. It was he who captured the standard of
the Lunenburg battalion. He came and cast the flag at the Emperor's feet.
He was covered with blood. While tearing down the banner he had received a
sword-cut across his face. The Emperor, greatly pleased, shouted to him:
"You are a colonel, you are a baron, you are an officer of the Legion of
Honor!" Pontmercy replied: "Sire, I thank you for my widow." An hour
later, he fell in the ravine of Ohain. Now, who was this Georges
Pontmercy? He was this same "brigand of the Loire."
We have already seen something of his history. After Waterloo, Pontmercy,
who had been pulled out of the hollow road of Ohain, as it will be
remembered, had succeeded in joining the army, and had dragged himself
from ambulance to ambulance as far as the cantonments of the Loire.
The Restoration had placed him on half-pay, then had sent him into
residence, that is to say, under surveillance, at Vernon. King Louis
XVIII., regarding all that which had taken place during the Hundred Days
as not having occurred at all, did not recognize his quality as an officer
of the Legion of Honor, nor his grade of colonel, nor his title of baron.
He, on his side, neglected no occasion of signing himself "Colonel Baron
Pontmercy." He had only an old blue coat, and he never went out without
fastening to it his rosette as an officer of the Legion of Honor. The
Attorney for the Crown had him warned that the authorities would prosecute
him for "illegal" wearing of this decoration. When this notice was
conveyed to him through an officious intermediary, Pontmercy retorted with
a bitter smile: "I do not know whether I no longer understand French, or
whether you no longer speak it; but the fact is that I do not understand."
Then he went out for eight successive days with his rosette. They dared
not interfere with him. Two or three times the Minister of War and the
general in command of the department wrote to him with the following
address: "A Monsieur le Commandant Pontmercy." He sent back the letters
with the seals unbroken. At the same moment, Napoleon at Saint Helena was
treating in the same fashion the missives of Sir Hudson Lowe addressed to
General Bonaparte. Pontmercy had ended, may we be pardoned the expression,
by having in his mouth the same saliva as his Emperor.
In the same way, there were at Rome Carthaginian prisoners who refused to
salute Flaminius, and who had a little of Hannibal's spirit.
One day he encountered the district-attorney in one of the streets of
Vernon, stepped up to him, and said: "Mr. Crown Attorney, am I permitted
to wear my scar?"
He had nothing save his meagre half-pay as chief of squadron. He had hired
the smallest house which he could find at Vernon. He lived there alone, we
have just seen how. Under the Empire, between two wars, he had found time
to marry Mademoiselle Gillenormand. The old bourgeois, thoroughly
indignant at bottom, had given his consent with a sigh, saying: "The
greatest families are forced into it." In 1815, Madame Pontmercy, an
admirable woman in every sense, by the way, lofty in sentiment and rare,
and worthy of her husband, died, leaving a child. This child had been the
colonel's joy in his solitude; but the grandfather had imperatively
claimed his grandson, declaring that if the child were not given to him he
would disinherit him. The father had yielded in the little one's interest,
and had transferred his love to flowers.
Moreover, he had renounced everything, and neither stirred up mischief nor
conspired. He shared his thoughts between the innocent things which he was
then doing and the great things which he had done. He passed his time in
expecting a pink or in recalling Austerlitz.
M. Gillenormand kept up no relations with his son-in-law. The colonel was
"a bandit" to him. M. Gillenormand never mentioned the colonel, except
when he occasionally made mocking allusions to "his Baronship." It had
been expressly agreed that Pontmercy should never attempt to see his son
nor to speak to him, under penalty of having the latter handed over to him
disowned and disinherited. For the Gillenormands, Pontmercy was a man
afflicted with the plague. They intended to bring up the child in their
own way. Perhaps the colonel was wrong to accept these conditions, but he
submitted to them, thinking that he was doing right and sacrificing no one
but himself.
The inheritance of Father Gillenormand did not amount to much; but the
inheritance of Mademoiselle Gillenormand the elder was considerable. This
aunt, who had remained unmarried, was very rich on the maternal side, and
her sister's son was her natural heir. The boy, whose name was Marius,
knew that he had a father, but nothing more. No one opened his mouth to
him about it. Nevertheless, in the society into which his grandfather took
him, whispers, innuendoes, and winks, had eventually enlightened the
little boy's mind; he had finally understood something of the case, and as
he naturally took in the ideas and opinions which were, so to speak, the
air he breathed, by a sort of infiltration and slow penetration, he
gradually came to think of his father only with shame and with a pain at
his heart.
While he was growing up in this fashion, the colonel slipped away every
two or three months, came to Paris on the sly, like a criminal breaking
his ban, and went and posted himself at Saint-Sulpice, at the hour when
Aunt Gillenormand led Marius to the mass. There, trembling lest the aunt
should turn round, concealed behind a pillar, motionless, not daring to
breathe, he gazed at his child. The scarred veteran was afraid of that old
spinster.
From this had arisen his connection with the cure of Vernon, M. l' Abbé
Mabeuf.
That worthy priest was the brother of a warden of Saint-Sulpice, who had
often observed this man gazing at his child, and the scar on his cheek,
and the large tears in his eyes. That man, who had so manly an air, yet
who was weeping like a woman, had struck the warden. That face had clung
to his mind. One day, having gone to Vernon to see his brother, he had
encountered Colonel Pontmercy on the bridge, and had recognized the man of
Saint-Sulpice. The warden had mentioned the circumstance to the cure, and
both had paid the colonel a visit, on some pretext or other. This visit
led to others. The colonel, who had been extremely reserved at first,
ended by opening his heart, and the cure and the warden finally came to
know the whole history, and how Pontmercy was sacrificing his happiness to
his child's future. This caused the cure to regard him with veneration and
tenderness, and the colonel, on his side, became fond of the cure. And
moreover, when both are sincere and good, no men so penetrate each other,
and so amalgamate with each other, as an old priest and an old soldier. At
bottom, the man is the same. The one has devoted his life to his country
here below, the other to his country on high; that is the only difference.
Twice a year, on the first of January and on St. George's day, Marius
wrote duty letters to his father, which were dictated by his aunt, and
which one would have pronounced to be copied from some formula; this was
all that M. Gillenormand tolerated; and the father answered them with very
tender letters which the grandfather thrust into his pocket unread.