Volume 2/Book 3/Chapter 9
Les Misérables, Volume 2: Cosette, Book Third: Accomplishment of the Promise Made to the Dead Woman, Chapter 9: Thénardier and his Manœuvres (Tome 2: Cosette, Livre troisième: Accomplissement de la promesse faite à la morte, Chapitre 9: Thénardier à la manœuvre)
Contents
General notes on this chapter
French text
Le lendemain matin, deux heures au moins avant le jour, le mari Thénardier, attablé près d'une chandelle dans la salle basse du cabaret, une plume à la main, composait la carte du voyageur à la redingote jaune.
La femme debout, à demi courbée sur lui, le suivait des yeux. Ils n'échangeaient pas une parole. C'était, d'un côté, une méditation profonde, de l'autre, cette admiration religieuse avec laquelle on regarde naître et s'épanouir une merveille de l'esprit humain. On entendait un bruit dans la maison; c'était l'Alouette qui balayait l'escalier.
Après un bon quart d'heure et quelques ratures, le Thénardier produisit ce chef-d'œuvre.
Note du Monsieur du No 1.
Souper Fr. 3 Chambre Fr. 10 Bougie Fr. 5 Feu Fr. 4 Service Fr. 1
Total Fr. 23 Service était écrit servisse.
—Vingt-trois francs! s'écria la femme avec un enthousiasme mêlé de quelque hésitation.
Comme tous les grands artistes, le Thénardier n'était pas content. —Peuh! fit-il.
C'était l'accent de Castlereagh rédigeant au congrès de Vienne la carte à payer de la France.
—Monsieur Thénardier, tu as raison, il doit bien cela, murmura la femme qui songeait à la poupée donnée à Cosette en présence de ses filles, c'est juste, mais c'est trop. Il ne voudra pas payer.
Le Thénardier fit son rire froid, et dit:
—Il payera.
Ce rire était la signification suprême de la certitude et de l'autorité. Ce qui était dit ainsi devait être. La femme n'insista point. Elle se mit à ranger les tables; le mari marchait de long en large dans la salle. Un moment après il ajouta:
—Je dois bien quinze cents francs, moi!
Il alla s'asseoir au coin de la cheminée, méditant, les pieds sur les cendres chaudes.
—Ah çà! reprit la femme, tu n'oublies pas que je flanque Cosette à la porte aujourd'hui? Ce monstre! elle me mange le cœur avec sa poupée! J'aimerais mieux épouser Louis XVIII que de la garder un jour de plus à la maison.
Le Thénardier alluma sa pipe et répondit entre deux bouffées.
—Tu remettras la carte à l'homme.
Puis il sortit.
Il était à peine hors de la salle que le voyageur y entra.
Le Thénardier reparut sur-le-champ derrière lui et demeura immobile dans la porte entre-bâillée, visible seulement pour sa femme.
L'homme jaune portait à la main son bâton et son paquet.
—Levé si tôt! dit la Thénardier, est-ce que monsieur nous quitte déjà?
Tout en parlant ainsi, elle tournait d'un air embarrassé la carte dans ses mains et y faisait des plis avec ses ongles. Son visage dur offrait une nuance qui ne lui était pas habituelle, la timidité et le scrupule.
Présenter une pareille note à un homme qui avait si parfaitement l'air d'«un pauvre», cela lui paraissait malaisé.
Le voyageur semblait préoccupé et distrait. Il répondit:
—Oui, madame. Je m'en vais.
—Monsieur, reprit-elle, n'avait donc pas d'affaires à Montfermeil?
—Non. Je passe par ici. Voilà tout. Madame, ajouta-t-il, qu'est-ce que je dois?
La Thénardier, sans répondre, lui tendit la carte pliée.
L'homme déplia le papier, le regarda, mais son attention était visiblement ailleurs.
—Madame, reprit-il, faites-vous de bonnes affaires dans ce Montfermeil?
—Comme cela, monsieur, répondit la Thénardier stupéfaite de ne point voir d'autre explosion.
Elle poursuivit d'un accent élégiaque et lamentable:
—Oh! monsieur, les temps sont bien durs! et puis nous avons si peu de bourgeois dans nos endroits! C'est tout petit monde, voyez-vous. Si nous n'avions pas par-ci par-là des voyageurs généreux et riches comme monsieur! Nous avons tant de charges. Tenez, cette petite nous coûte les yeux de la tête.
—Quelle petite?
—Eh bien, la petite, vous savez! Cosette! l'Alouette, comme on dit dans le pays!
—Ah! dit l'homme.
Elle continua:
—Sont-ils bêtes, ces paysans, avec leurs sobriquets! elle a plutôt l'air d'une chauve-souris que d'une alouette. Voyez-vous, monsieur, nous ne demandons pas la charité, mais nous ne pouvons pas la faire. Nous ne gagnons rien, et nous avons gros à payer. La patente, les impositions, les portes et fenêtres, les centimes! Monsieur sait que le gouvernement demande un argent terrible! Et puis j'ai mes filles, moi. Je n'ai pas besoin de nourrir l'enfant des autres. L'homme reprit, de cette voix qu'il s'efforçait de rendre indifférente et dans laquelle il y avait un tremblement:
—Et si l'on vous en débarrassait?
—De qui? de la Cosette?
—Oui.
La face rouge et violente de la gargotière s'illumina d'un épanouissement hideux.
—Ah, monsieur! mon bon monsieur! prenez-la, gardez-la, emmenez-la, emportez-la, sucrez-la, truffez-la, buvez-la, mangez-la, et soyez béni de la bonne sainte Vierge et de tous les saints du paradis!
—C'est dit.
—Vrai? vous l'emmenez?
—Je l'emmène.
—Tout de suite?
—Tout de suite. Appelez l'enfant.
—Cosette! cria la Thénardier.
—En attendant, poursuivit l'homme, je vais toujours vous payer ma dépense. Combien est-ce?
Il jeta un coup d'œil sur la carte et ne put réprimer un mouvement de surprise:
—Vingt-trois francs!
Il regarda la gargotière et répéta:
—Vingt-trois francs?
Il y avait dans la prononciation de ces deux mots ainsi répétés l'accent qui sépare le point d'exclamation du point d'interrogation.
La Thénardier avait eu le temps de se préparer au choc. Elle répondit avec assurance:
—Dame oui, monsieur! c'est vingt-trois francs.
L'étranger posa cinq pièces de cinq francs sur la table.
—Allez chercher la petite, dit-il.
En ce moment, le Thénardier s'avança au milieu de la salle et dit:
—Monsieur doit vingt-six sous.
—Vingt-six sous! s'écria la femme.
—Vingt sous pour la chambre, reprit le Thénardier froidement, et six sous pour le souper. Quant à la petite, j'ai besoin d'en causer un peu avec monsieur. Laisse-nous, ma femme. La Thénardier eut un de ces éblouissements que donnent les éclairs imprévus du talent. Elle sentit que le grand acteur entrait en scène, ne répliqua pas un mot, et sortit.
Dès qu'ils furent seuls, le Thénardier offrit une chaise au voyageur. Le voyageur s'assit; le Thénardier resta debout, et son visage prit une singulière expression de bonhomie et de simplicité.
—Monsieur, dit-il, tenez, je vais vous dire. C'est que je l'adore, moi, cette enfant.
L'étranger le regarda fixement.
—Quelle enfant?
Thénardier continua:
—Comme c'est drôle! on s'attache. Qu'est-ce que c'est que tout cet argent-là? reprenez donc vos pièces de cent sous. C'est une enfant que j'adore.
—Qui ça? demanda l'étranger.
—Hé, notre petite Cosette! ne voulez-vous pas nous l'emmener? Eh bien, je parle franchement, vrai comme vous êtes un honnête homme, je ne peux pas y consentir. Elle me ferait faute, cette enfant. J'ai vu ça tout petit. C'est vrai qu'elle nous coûte de l'argent, c'est vrai qu'elle a des défauts, c'est vrai que nous ne sommes pas riches, c'est vrai que j'ai payé plus de quatre cents francs en drogues rien que pour une de ses maladies! Mais il faut bien faire quelque chose pour le bon Dieu. Ça n'a ni père ni mère, je l'ai élevée. J'ai du pain pour elle et pour moi. Au fait j'y tiens, à cette enfant. Vous comprenez, on se prend d'affection; je suis une bonne bête, moi; je ne raisonne pas; je l'aime, cette petite; ma femme est vive, mais elle l'aime aussi. Voyez-vous, c'est comme notre enfant. J'ai besoin que ça babille dans la maison.
L'étranger le regardait toujours fixement. Il continua:
—Pardon, excuse, monsieur, mais on ne donne point son enfant comme ça à un passant. Pas vrai que j'ai raison? Après cela, je ne dis pas, vous êtes riche, vous avez l'air d'un bien brave homme, si c'était pour son bonheur? Mais il faudrait savoir. Vous comprenez? Une supposition que je la laisserais aller et que je me sacrifierais, je voudrais savoir où elle va, je ne voudrais pas la perdre de vue, je voudrais savoir chez qui elle est, pour l'aller voir de temps en temps, qu'elle sache que son bon père nourricier est là, qu'il veille sur elle. Enfin il y a des choses qui ne sont pas possibles. Je ne sais seulement pas votre nom? Vous l'emmèneriez, je dirais: eh bien, l'Alouette? Où donc a-t-elle passé? Il faudrait au moins voir quelque méchant chiffon de papier, un petit bout de passeport, quoi!
L'étranger, sans cesser de le regarder de ce regard qui va, pour ainsi dire, jusqu'au fond de la conscience, lui répondit d'un accent grave et ferme:
—Monsieur Thénardier, on n'a pas de passeport pour venir à cinq lieues de Paris. Si j'emmène Cosette, je l'emmènerai, voilà tout. Vous ne saurez pas mon nom, vous ne saurez pas ma demeure, vous ne saurez pas où elle sera, et mon intention est qu'elle ne vous revoie de sa vie. Je casse le fil qu'elle a au pied, et elle s'en va. Cela vous convient-il? Oui ou non.
De même que les démons et les génies reconnaissaient à de certains signes la présence d'un dieu supérieur, le Thénardier comprit qu'il avait affaire à quelqu'un de très fort. Ce fut comme une intuition; il comprit cela avec sa promptitude nette et sagace. La veille, tout en buvant avec les rouliers, tout en fumant, tout en chantant des gaudrioles, il avait passé la soirée à observer l'étranger, le guettant comme un chat et l'étudiant comme un mathématicien. Il l'avait à la fois épié pour son propre compte, pour le plaisir et par instinct, et espionné comme s'il eût été payé pour cela. Pas un geste, pas un mouvement de l'homme à la capote jaune ne lui était échappé. Avant même que l'inconnu manifestât si clairement son intérêt pour Cosette, le Thénardier l'avait deviné. Il avait surpris les regards profonds de ce vieux qui revenaient toujours à l'enfant. Pourquoi cet intérêt? Qu'était-ce que cet homme? Pourquoi, avec tant d'argent dans sa bourse, ce costume si misérable? Questions qu'il se posait sans pouvoir les résoudre et qui l'irritaient. Il y avait songé toute la nuit. Ce ne pouvait être le père de Cosette. Était-ce quelque grand-père? Alors pourquoi ne pas se faire connaître tout de suite? Quand on a un droit, on le montre. Cet homme évidemment n'avait pas de droit sur Cosette. Alors qu'était-ce? Le Thénardier se perdait en suppositions. Il entrevoyait tout, et ne voyait rien. Quoi qu'il en fût, en entamant la conversation avec l'homme, sûr qu'il y avait un secret dans tout cela, sûr que l'homme était intéressé à rester dans l'ombre, il se sentait fort; à la réponse nette et ferme de l'étranger, quand il vit que ce personnage mystérieux était mystérieux si simplement, il se sentit faible. Il ne s'attendait à rien de pareil. Ce fut la déroute de ses conjectures. Il rallia ses idées. Il pesa tout cela en une seconde. Le Thénardier était un de ces hommes qui jugent d'un coup d'œil une situation. Il estima que c'était le moment de marcher droit et vite. Il fit comme les grands capitaines à cet instant décisif qu'ils savent seuls reconnaître, il démasqua brusquement sa batterie.
—Monsieur, dit-il, il me faut quinze cents francs.
L'étranger prit dans sa poche de côté un vieux portefeuille en cuir noir, l'ouvrit et en tira trois billets de banque qu'il posa sur la table. Puis il appuya son large pouce sur ces billets, et dit au gargotier:
—Faites venir Cosette. Pendant que ceci se passait, que faisait Cosette?
Cosette, en s'éveillant, avait couru à son sabot. Elle y avait trouvé la pièce d'or. Ce n'était pas un napoléon, c'était une de ces pièces de vingt francs toutes neuves de la restauration sur l'effigie desquelles la petite queue prussienne avait remplacé la couronne de laurier. Cosette fut éblouie. Sa destinée commençait à l'enivrer. Elle ne savait pas ce que c'était qu'une pièce d'or, elle n'en avait jamais vu, elle la cacha bien vite dans sa poche comme si elle l'avait volée. Cependant elle sentait que cela était bien à elle, elle devinait d'où ce don lui venait, mais elle éprouvait une sorte de joie pleine de peur. Elle était contente; elle était surtout stupéfaite. Ces choses si magnifiques et si jolies ne lui paraissaient pas réelles. La poupée lui faisait peur, la pièce d'or lui faisait peur. Elle tremblait vaguement devant ces magnificences. L'étranger seul ne lui faisait pas peur. Au contraire, il la rassurait. Depuis la veille, à travers ses étonnements, à travers son sommeil, elle songeait dans son petit esprit d'enfant à cet homme qui avait l'air vieux et pauvre et si triste, et qui était si riche et si bon. Depuis qu'elle avait rencontré ce bonhomme dans le bois, tout était comme changé pour elle. Cosette, moins heureuse que la moindre hirondelle du ciel, n'avait jamais su ce que c'est que de se réfugier à l'ombre de sa mère et sous une aile. Depuis cinq ans, c'est-à-dire aussi loin que pouvaient remonter ses souvenirs, la pauvre enfant frissonnait et grelottait. Elle avait toujours été toute nue sous la bise aigre du malheur, maintenant il lui semblait qu'elle était vêtue. Autrefois son âme avait froid, maintenant elle avait chaud. Elle n'avait plus autant de crainte de la Thénardier. Elle n'était plus seule; il y avait quelqu'un là.
Elle s'était mise bien vite à sa besogne de tous les matins. Ce louis, qu'elle avait sur elle, dans ce même gousset de son tablier d'où la pièce de quinze sous était tombée la veille, lui donnait des distractions. Elle n'osait pas y toucher, mais elle passait des cinq minutes à le contempler, il faut le dire, en tirant la langue. Tout en balayant l'escalier, elle s'arrêtait, et restait là, immobile, oubliant le balai et l'univers entier, occupée à regarder cette étoile briller au fond de sa poche.
Ce fut dans une de ces contemplations que la Thénardier la rejoignit.
Sur l'ordre de son mari, elle l'était allée chercher. Chose inouïe, elle ne lui donna pas une tape et ne lui dit pas une injure.
—Cosette, dit-elle presque doucement, viens tout de suite.
Un instant après, Cosette entrait dans la salle basse.
L'étranger prit le paquet qu'il avait apporté et le dénoua. Ce paquet contenait une petite robe de laine, un tablier, une brassière de futaine, un jupon, un fichu, des bas de laine, des souliers, un vêtement complet pour une fille de huit ans. Tout cela était noir.
—Mon enfant, dit l'homme, prends ceci et va t'habiller bien vite.
Le jour paraissait lorsque ceux des habitants de Montfermeil qui commençaient à ouvrir leurs portes virent passer dans la rue de Paris un bonhomme pauvrement vêtu donnant la main à une petite fille tout en deuil qui portait une grande poupée rose dans ses bras. Ils se dirigeaient du côté de Livry.
C'étaient notre homme et Cosette.
Personne ne connaissait l'homme; comme Cosette n'était plus en guenilles, beaucoup ne la reconnurent pas.
Cosette s'en allait. Avec qui? elle l'ignorait. Où? elle ne savait. Tout ce qu'elle comprenait, c'est qu'elle laissait derrière elle la gargote Thénardier. Personne n'avait songé à lui dire adieu, ni elle à dire adieu à personne. Elle sortait de cette maison haïe et haïssant.
Pauvre doux être dont le cœur n'avait jusqu'à cette heure été que comprimé!
Cosette marchait gravement, ouvrant ses grands yeux et considérant le ciel. Elle avait mis son louis dans la poche de son tablier neuf. De temps en temps elle se penchait et lui jetait un coup d'œil, puis elle regardait le bonhomme. Elle sentait quelque chose comme si elle était près du bon Dieu.
English text
On the following morning, two hours at least before day-break, Thénardier, seated beside a candle in the public room of the tavern, pen in hand, was making out the bill for the traveller with the yellow coat.
His wife, standing beside him, and half bent over him, was following him with her eyes. They exchanged not a word. On the one hand, there was profound meditation, on the other, the religious admiration with which one watches the birth and development of a marvel of the human mind. A noise was audible in the house; it was the Lark sweeping the stairs.
After the lapse of a good quarter of an hour, and some erasures, Thénardier produced the following masterpiece:—
BILL OF THE GENTLEMAN IN No. 1.
Supper . . . . . . . . . . . . . . . 3 francs. Chamber . . . . . . . . . . . . . . 10 ”
Candle . . . . . . . . . . . . . . . 5 ” Fire . . . . . . . . . . . . . . . . 4 ” Service . . . . . . . . . . . . . . 1 ” —————
Total . . . . . . 23 francs. Service was written servisse.
“Twenty-three francs!” cried the woman, with an enthusiasm which was mingled with some hesitation.
Like all great artists, Thénardier was dissatisfied.
“Peuh!” he exclaimed.
It was the accent of Castlereagh auditing France’s bill at the Congress of Vienna.
“Monsieur Thénardier, you are right; he certainly owes that,” murmured the wife, who was thinking of the doll bestowed on Cosette in the presence of her daughters. “It is just, but it is too much. He will not pay it.”
Thénardier laughed coldly, as usual, and said:—
“He will pay.”
This laugh was the supreme assertion of certainty and authority. That which was asserted in this manner must needs be so. His wife did not insist.
She set about arranging the table; her husband paced the room. A moment later he added:—
“I owe full fifteen hundred francs!”
He went and seated himself in the chimney-corner, meditating, with his feet among the warm ashes.
“Ah! by the way,” resumed his wife, “you don’t forget that I’m going to turn Cosette out of doors to-day? The monster! She breaks my heart with that doll of hers! I’d rather marry Louis XVIII. than keep her another day in the house!”
Thénardier lighted his pipe, and replied between two puffs:—
“You will hand that bill to the man.”
Then he went out.
Hardly had he left the room when the traveller entered.
Thénardier instantly reappeared behind him and remained motionless in the half-open door, visible only to his wife.
The yellow man carried his bundle and his cudgel in his hand.
“Up so early?” said Madame Thénardier; “is Monsieur leaving us already?”
As she spoke thus, she was twisting the bill about in her hands with an embarrassed air, and making creases in it with her nails. Her hard face presented a shade which was not habitual with it,—timidity and scruples.
To present such a bill to a man who had so completely the air “of a poor wretch” seemed difficult to her.
The traveller appeared to be preoccupied and absent-minded. He replied:—
“Yes, Madame, I am going.”
“So Monsieur has no business in Montfermeil?”
“No, I was passing through. That is all. What do I owe you, Madame,” he added.
The Thénardier silently handed him the folded bill.
The man unfolded the paper and glanced at it; but his thoughts were evidently elsewhere.
“Madame,” he resumed, “is business good here in Montfermeil?”
“So so, Monsieur,” replied the Thénardier, stupefied at not witnessing another sort of explosion.
She continued, in a dreary and lamentable tone:—
“Oh! Monsieur, times are so hard! and then, we have so few bourgeois in the neighborhood! All the people are poor, you see. If we had not, now and then, some rich and generous travellers like Monsieur, we should not get along at all. We have so many expenses. Just see, that child is costing us our very eyes.”
“What child?”
“Why, the little one, you know! Cosette—the Lark, as she is called hereabouts!”
“Ah!” said the man.
She went on:—
“How stupid these peasants are with their nicknames! She has more the air of a bat than of a lark. You see, sir, we do not ask charity, and we cannot bestow it. We earn nothing and we have to pay out a great deal. The license, the imposts, the door and window tax, the hundredths! Monsieur is aware that the government demands a terrible deal of money. And then, I have my daughters. I have no need to bring up other people’s children.”
The man resumed, in that voice which he strove to render indifferent, and in which there lingered a tremor:—
“What if one were to rid you of her?”
“Who? Cosette?”
“Yes.”
The landlady’s red and violent face brightened up hideously.
“Ah! sir, my dear sir, take her, keep her, lead her off, carry her away, sugar her, stuff her with truffles, drink her, eat her, and the blessings of the good holy Virgin and of all the saints of paradise be upon you!”
“Agreed.”
“Really! You will take her away?”
“I will take her away.”
“Immediately?”
“Immediately. Call the child.”
“Cosette!” screamed the Thénardier.
“In the meantime,” pursued the man, “I will pay you what I owe you. How much is it?”
He cast a glance on the bill, and could not restrain a start of surprise:—
“Twenty-three francs!”
He looked at the landlady, and repeated:—
“Twenty-three francs?”
There was in the enunciation of these words, thus repeated, an accent between an exclamation and an interrogation point.
The Thénardier had had time to prepare herself for the shock. She replied, with assurance:—
“Good gracious, yes, sir, it is twenty-three francs.”
The stranger laid five five-franc pieces on the table.
“Go and get the child,” said he.
At that moment Thénardier advanced to the middle of the room, and said:—
“Monsieur owes twenty-six sous.”
“Twenty-six sous!” exclaimed his wife.
“Twenty sous for the chamber,” resumed Thénardier, coldly, “and six sous for his supper. As for the child, I must discuss that matter a little with the gentleman. Leave us, wife.”
Madame Thénardier was dazzled as with the shock caused by unexpected lightning flashes of talent. She was conscious that a great actor was making his entrance on the stage, uttered not a word in reply, and left the room.
As soon as they were alone, Thénardier offered the traveller a chair. The traveller seated himself; Thénardier remained standing, and his face assumed a singular expression of good-fellowship and simplicity.
“Sir,” said he, “what I have to say to you is this, that I adore that child.”
The stranger gazed intently at him.
“What child?”
Thénardier continued:—
“How strange it is, one grows attached. What money is that? Take back your hundred-sou piece. I adore the child.”
“Whom do you mean?” demanded the stranger.
“Eh! our little Cosette! Are you not intending to take her away from us? Well, I speak frankly; as true as you are an honest man, I will not consent to it. I shall miss that child. I saw her first when she was a tiny thing. It is true that she costs us money; it is true that she has her faults; it is true that we are not rich; it is true that I have paid out over four hundred francs for drugs for just one of her illnesses! But one must do something for the good God’s sake. She has neither father nor mother. I have brought her up. I have bread enough for her and for myself. In truth, I think a great deal of that child. You understand, one conceives an affection for a person; I am a good sort of a beast, I am; I do not reason; I love that little girl; my wife is quick-tempered, but she loves her also. You see, she is just the same as our own child. I want to keep her to babble about the house.”
The stranger kept his eye intently fixed on Thénardier. The latter continued:—
“Excuse me, sir, but one does not give away one’s child to a passer-by, like that. I am right, am I not? Still, I don’t say—you are rich; you have the air of a very good man,—if it were for her happiness. But one must find out that. You understand: suppose that I were to let her go and to sacrifice myself, I should like to know what becomes of her; I should not wish to lose sight of her; I should like to know with whom she is living, so that I could go to see her from time to time; so that she may know that her good foster-father is alive, that he is watching over her. In short, there are things which are not possible. I do not even know your name. If you were to take her away, I should say: ‘Well, and the Lark, what has become of her?’ One must, at least, see some petty scrap of paper, some trifle in the way of a passport, you know!”
The stranger, still surveying him with that gaze which penetrates, as the saying goes, to the very depths of the conscience, replied in a grave, firm voice:—
“Monsieur Thénardier, one does not require a passport to travel five leagues from Paris. If I take Cosette away, I shall take her away, and that is the end of the matter. You will not know my name, you will not know my residence, you will not know where she is; and my intention is that she shall never set eyes on you again so long as she lives. I break the thread which binds her foot, and she departs. Does that suit you? Yes or no?”
Since geniuses, like demons, recognize the presence of a superior God by certain signs, Thénardier comprehended that he had to deal with a very strong person. It was like an intuition; he comprehended it with his clear and sagacious promptitude. While drinking with the carters, smoking, and singing coarse songs on the preceding evening, he had devoted the whole of the time to observing the stranger, watching him like a cat, and studying him like a mathematician. He had watched him, both on his own account, for the pleasure of the thing, and through instinct, and had spied upon him as though he had been paid for so doing. Not a movement, not a gesture, on the part of the man in the yellow great-coat had escaped him. Even before the stranger had so clearly manifested his interest in Cosette, Thénardier had divined his purpose. He had caught the old man’s deep glances returning constantly to the child. Who was this man? Why this interest? Why this hideous costume, when he had so much money in his purse? Questions which he put to himself without being able to solve them, and which irritated him. He had pondered it all night long. He could not be Cosette’s father. Was he her grandfather? Then why not make himself known at once? When one has a right, one asserts it. This man evidently had no right over Cosette. What was it, then? Thénardier lost himself in conjectures. He caught glimpses of everything, but he saw nothing. Be that as it may, on entering into conversation with the man, sure that there was some secret in the case, that the latter had some interest in remaining in the shadow, he felt himself strong; when he perceived from the stranger’s clear and firm retort, that this mysterious personage was mysterious in so simple a way, he became conscious that he was weak. He had expected nothing of the sort. His conjectures were put to the rout. He rallied his ideas. He weighed everything in the space of a second. Thénardier was one of those men who take in a situation at a glance. He decided that the moment had arrived for proceeding straightforward, and quickly at that. He did as great leaders do at the decisive moment, which they know that they alone recognize; he abruptly unmasked his batteries.
“Sir,” said he, “I am in need of fifteen hundred francs.”
The stranger took from his side pocket an old pocketbook of black leather, opened it, drew out three bank-bills, which he laid on the table. Then he placed his large thumb on the notes and said to the inn-keeper:—
“Go and fetch Cosette.”
While this was taking place, what had Cosette been doing?
On waking up, Cosette had run to get her shoe. In it she had found the gold piece. It was not a Napoleon; it was one of those perfectly new twenty-franc pieces of the Restoration, on whose effigy the little Prussian queue had replaced the laurel wreath. Cosette was dazzled. Her destiny began to intoxicate her. She did not know what a gold piece was; she had never seen one; she hid it quickly in her pocket, as though she had stolen it. Still, she felt that it really was hers; she guessed whence her gift had come, but the joy which she experienced was full of fear. She was happy; above all she was stupefied. Such magnificent and beautiful things did not appear real. The doll frightened her, the gold piece frightened her. She trembled vaguely in the presence of this magnificence. The stranger alone did not frighten her. On the contrary, he reassured her. Ever since the preceding evening, amid all her amazement, even in her sleep, she had been thinking in her little childish mind of that man who seemed to be so poor and so sad, and who was so rich and so kind. Everything had changed for her since she had met that good man in the forest. Cosette, less happy than the most insignificant swallow of heaven, had never known what it was to take refuge under a mother’s shadow and under a wing. For the last five years, that is to say, as far back as her memory ran, the poor child had shivered and trembled. She had always been exposed completely naked to the sharp wind of adversity; now it seemed to her she was clothed. Formerly her soul had seemed cold, now it was warm. Cosette was no longer afraid of the Thénardier. She was no longer alone; there was some one there.
She hastily set about her regular morning duties. That louis, which she had about her, in the very apron pocket whence the fifteen-sou piece had fallen on the night before, distracted her thoughts. She dared not touch it, but she spent five minutes in gazing at it, with her tongue hanging out, if the truth must be told. As she swept the staircase, she paused, remained standing there motionless, forgetful of her broom and of the entire universe, occupied in gazing at that star which was blazing at the bottom of her pocket.
It was during one of these periods of contemplation that the Thénardier joined her. She had gone in search of Cosette at her husband’s orders. What was quite unprecedented, she neither struck her nor said an insulting word to her.
“Cosette,” she said, almost gently, “come immediately.”
An instant later Cosette entered the public room.
The stranger took up the bundle which he had brought and untied it. This bundle contained a little woollen gown, an apron, a fustian bodice, a kerchief, a petticoat, woollen stockings, shoes—a complete outfit for a girl of seven years. All was black.
“My child,” said the man, “take these, and go and dress yourself quickly.”
Daylight was appearing when those of the inhabitants of Montfermeil who had begun to open their doors beheld a poorly clad old man leading a little girl dressed in mourning, and carrying a pink doll in her arms, pass along the road to Paris. They were going in the direction of Livry.
It was our man and Cosette.
No one knew the man; as Cosette was no longer in rags, many did not recognize her. Cosette was going away. With whom? She did not know. Whither? She knew not. All that she understood was that she was leaving the Thénardier tavern behind her. No one had thought of bidding her farewell, nor had she thought of taking leave of any one. She was leaving that hated and hating house.
Poor, gentle creature, whose heart had been repressed up to that hour!
Cosette walked along gravely, with her large eyes wide open, and gazing at the sky. She had put her louis in the pocket of her new apron. From time to time, she bent down and glanced at it; then she looked at the good man. She felt something as though she were beside the good God.