Volume 2/Book 6/Chapter 2
Les Misérables, Volume 2: Cosette, Book Sixth: Le Petit-Picpus, Chapter 2: The Obedience of Martin Verga
(Tome 2: Cosette, Livre sixième: Le Petit-Picpus, Chapitre 2: L'obédience de Martin Verga)
Contents
General notes on this chapter
French text
Ce couvent, qui en 1824 existait depuis longues années déjà petite rue Picpus, était une communauté de bernardines de l'obédience de Martin Verga.
Ces bernardines, par conséquent, se rattachaient non à Clairvaux, comme
les bernardins, mais à Cîteaux, comme les bénédictins. En d'autres
termes, elles étaient sujettes, non de saint Bernard, mais de saint
Benoît.
Quiconque a un peu remué des in-folio sait que Martin Verga fonda en
1425 une congrégation de bernardines-bénédictines, ayant pour chef
d'ordre Salamanque et pour succursale Alcala.
Cette congrégation avait poussé des rameaux dans tous les pays
catholiques de l'Europe.
Ces greffes d'un ordre sur l'autre n'ont rien d'inusité dans l'église
latine. Pour ne parler que du seul ordre de saint Benoît dont il est ici
question, à cet ordre se rattachent, sans compter l'obédience de Martin
Verga, quatre congrégations: deux en Italie, le Mont-Cassin et
Sainte-Justine de Padoue, deux en France, Cluny et Saint-Maur; et neuf
ordres, Valombrosa, Grammont, les célestins, les camaldules, les
chartreux, les humiliés, les olivateurs, et les silvestrins, enfin
Cîteaux; car Cîteaux lui-même, tronc pour d'autres ordres, n'est qu'un
rejeton pour saint Benoît. Cîteaux date de saint Robert, abbé de Molesme
dans le diocèse de Langres en 1098. Or c'est en 529 que le diable,
retiré au désert de Subiaco (il était vieux; s'était-il fait ermite?),
fut chassé de l'ancien temple d'Apollon où il demeurait, par saint
Benoît, âgé de dix-sept ans.
Après la règle des carmélites, lesquelles vont pieds nus, portent une
pièce d'osier sur la gorge et ne s'asseyent jamais, la règle la plus
dure est celle des bernardines-bénédictines de Martin Verga. Elles sont
vêtues de noir avec une guimpe qui, selon la prescription expresse de
saint Benoît, monte jusqu'au menton. Une robe de serge à manches larges,
un grand voile de laine, la guimpe qui monte jusqu'au menton coupée
carrément sur la poitrine, le bandeau qui descend jusqu'aux yeux, voilà
leur habit. Tout est noir, excepté le bandeau qui est blanc. Les novices
portent le même habit, tout blanc. Les professes ont en outre un rosaire
au côté.
Les bernardines-bénédictines de Martin Verga pratiquent l'Adoration
Perpétuelle, comme les bénédictines dites dames du Saint-Sacrement,
lesquelles, au commencement de ce siècle, avaient à Paris deux maisons,
l'une au Temple, l'autre rue Neuve-Sainte-Geneviève. Du reste les
bernardines-bénédictines du Petit-Picpus, dont nous parlons, étaient un
ordre absolument autre que les dames du Saint-Sacrement cloîtrées rue
Neuve-Sainte-Geneviève et au Temple. Il y avait de nombreuses
différences dans la règle; il y en avait dans le costume. Les
bernardines-bénédictines du Petit-Picpus portaient la guimpe noire, et
les bénédictines du Saint-Sacrement et de la rue Neuve-Sainte-Geneviève
la portaient blanche, et avaient de plus sur la poitrine un
Saint-Sacrement d'environ trois pouces de haut en vermeil ou en cuivre
doré. Les religieuses du Petit-Picpus ne portaient point ce
Saint-Sacrement. L'Adoration Perpétuelle, commune à la maison du
Petit-Picpus et à la maison du Temple, laisse les deux ordres
parfaitement distincts. Il y a seulement ressemblance pour cette
pratique entre les dames du Saint-Sacrement et les bernardines de Martin
Verga, de même qu'il y avait similitude, pour l'étude et la
glorification de tous les mystères relatifs à l'enfance, à la vie et à
la mort de Jésus-Christ, et à la Vierge, entre deux ordres pourtant fort
séparés et dans l'occasion ennemis, l'oratoire d'Italie, établi à
Florence par Philippe de Néri, et l'oratoire de France, établi à Paris
par Pierre de Bérulle. L'oratoire de Paris prétendait le pas, Philippe
de Néri n'étant que saint, et Bérulle étant cardinal.
Revenons à la dure règle espagnole de Martin Verga.
Les bernardines-bénédictines de cette obédience font maigre toute
l'année, jeûnent le carême et beaucoup d'autres jours qui leur sont
spéciaux, se relèvent dans leur premier sommeil depuis une heure du
matin jusqu'à trois pour lire le bréviaire et chanter matines, couchent
dans des draps de serge en toute saison et sur la paille, n'usent point
de bains, n'allument jamais de feu, se donnent la discipline tous les
vendredis, observent la règle du silence, ne se parlent qu'aux
récréations, lesquelles sont très courtes, et portent des chemises de
bure pendant six mois, du 14 septembre, qui est l'exaltation de la
sainte-croix, jusqu'à Pâques. Ces six mois sont une modération, la règle
dit toute l'année; mais cette chemise de bure, insupportable dans les
chaleurs de l'été, produisait des fièvres et des spasmes nerveux. Il a
fallu en restreindre l'usage. Même avec cet adoucissement, le 14
septembre, quand les religieuses mettent cette chemise, elles ont trois
ou quatre jours de fièvre. Obéissance, pauvreté, chasteté, stabilité
sous clôture; voilà leurs vœux, fort aggravés par la règle.
La prieure est élue pour trois ans par les mères, qu'on appelle mères
vocales parce qu'elles ont voix au chapitre. Une prieure ne peut être
réélue que deux fois, ce qui fixe à neuf ans le plus long règne possible
d'une prieure.
Elles ne voient jamais le prêtre officiant, qui leur est toujours caché
par une serge tendue à neuf pieds de haut. Au sermon, quand le
prédicateur est dans la chapelle, elles baissent leur voile sur leur
visage. Elles doivent toujours parler bas, marcher les yeux à terre et
la tête inclinée. Un seul homme peut entrer dans le couvent,
l'archevêque diocésain.
Il y en a bien un autre, qui est le jardinier; mais c'est toujours un
vieillard, et afin qu'il soit perpétuellement seul dans le jardin et que
les religieuses soient averties de l'éviter, on lui attache une
clochette au genou.
Elles sont soumises à la prieure d'une soumission absolue et passive.
C'est la sujétion canonique dans toute son abnégation. Comme à la voix
du Christ, ut voci Christi, au geste, au premier signe, ad nutum, ad
primum signum, tout de suite, avec bonheur, avec persévérance, avec une
certaine obéissance aveugle, prompte, hilariter perseveranter et caeca
quadam obedientia, comme la lime dans la main de l'ouvrier, quasi
limam in manibus fabri, ne pouvant lire ni écrire quoi que ce soit sans
permission expresse, legere vel scribere non addiscerit sine expressa
superioris licentia.
À tour de rôle chacune d'elles fait ce qu'elles appellent la
réparation. La réparation, c'est la prière pour tous les péchés, pour
toutes les fautes, pour tous les désordres, pour toutes les violations,
pour toutes les iniquités, pour tous les crimes qui se commettent sur la
terre. Pendant douze heures consécutives, de quatre heures du soir à
quatre heures du matin, ou de quatre heures du matin à quatre heures du
soir, la sœur qui fait la réparation reste à genoux sur la pierre
devant le Saint-Sacrement, les mains jointes, la corde au cou. Quand la
fatigue devient insupportable, elle se prosterne à plat ventre, la face
contre terre, les bras en croix; c'est là tout son soulagement. Dans
cette attitude, elle prie pour tous les coupables de l'univers. Ceci est
grand jusqu'au sublime.
Comme cet acte s'accomplit devant un poteau au haut duquel brûle un
cierge, on dit indistinctement faire la réparation ou être au
poteau. Les religieuses préfèrent même, par humilité, cette dernière
expression qui contient une idée de supplice et d'abaissement.
Faire la réparation est une fonction où toute l'âme s'absorbe. La
sœur au poteau ne se retournerait pas pour le tonnerre tombant derrière
elle.
En outre, il y a toujours une religieuse à genoux devant le
Saint-Sacrement. Cette station dure une heure. Elles se relèvent comme
des soldats en faction. C'est là l'Adoration Perpétuelle.
Les prieures et les mères portent presque toujours des noms empreints
d'une gravité particulière, rappelant, non des saintes et des martyres,
mais des moments de la vie de Jésus-Christ, comme la mère Nativité, la
mère Conception, la mère Présentation, la mère Passion. Cependant les
noms de saintes ne sont pas interdits.
Quand on les voit, on ne voit jamais que leur bouche. Toutes ont les
dents jaunes. Jamais une brosse à dents n'est entrée dans le couvent. Se
brosser les dents, est au haut d'une échelle au bas de laquelle il y a:
perdre son âme.
Elles ne disent de rien ma ni mon. Elles n'ont rien à elles et ne
doivent tenir à rien. Elles disent de toute chose notre; ainsi: notre
voile, notre chapelet; si elles parlaient de leur chemise, elles
diraient notre chemise. Quelquefois elles s'attachent à quelque petit
objet, à un livre d'heures, à une relique, à une médaille bénite. Dès
qu'elles s'aperçoivent qu'elles commencent à tenir à cet objet, elles
doivent le donner. Elles se rappellent le mot de sainte Thérèse à
laquelle une grande dame, au moment d'entrer dans son ordre, disait:
Permettez, ma mère, que j'envoie chercher une sainte bible à laquelle je
tiens beaucoup.—Ah! vous tenez à quelque chose! En ce cas, n'entrez
pas chez nous.
Défense à qui que ce soit de s'enfermer, et d'avoir un chez-soi, une
chambre. Elles vivent cellules ouvertes. Quand elles s'abordent, l'une
dit: Loué soit et adoré le très Saint-Sacrement de l'autel! L'autre
répond: À jamais. Même cérémonie quand l'une frappe à la porte de
l'autre. À peine la porte a-t-elle été touchée qu'on entend de l'autre
côté une voix douce dire précipitamment: À jamais! Comme toutes les
pratiques, cela devient machinal par l'habitude; et l'une dit
quelquefois à jamais avant que l'autre ait eu le temps de dire, ce qui
est assez long d'ailleurs: Loué soit et adoré le très Saint-Sacrement
de l'autel! Chez les visitandines, celle qui entre dit: Ave Maria, et
celle chez laquelle on entre dit: Gratiâ plena. C'est leur bonjour,
qui est «plein de grâce» en effet.
À chaque heure du jour, trois coups supplémentaires sonnent à la cloche
de l'église du couvent. À ce signal, prieure, mères vocales, professes,
converses, novices, postulantes, interrompent ce qu'elles disent, ce
qu'elles font ou ce qu'elles pensent, et toutes disent à la fois, s'il
est cinq heures, par exemple:—À cinq heures et à toute heure, loué
soit et adoré le très Saint-Sacrement de l'autel! S'il est huit
heures:—À huit heures et à toute heure, etc., et ainsi de suite,
selon l'heure qu'il est.
Cette coutume, qui a pour but de rompre la pensée et de la ramener
toujours à Dieu, existe dans beaucoup de communautés; seulement la
formule varie. Ainsi, à l'Enfant-Jésus, on dit:—À l'heure qu'il est et
à toute heure que l'amour de Jésus enflamme mon cœur!
Les bénédictines-bernardines de Martin Verga, cloîtrées il y a cinquante
ans au Petit-Picpus, chantent les offices sur une psalmodie grave,
plain-chant pur, et toujours à pleine voix toute la durée de l'office.
Partout où il y a un astérisque dans le missel, elles font une pause et
disent à voix basse: Jésus-Marie-Joseph. Pour l'office des morts,
elles prennent le ton si bas, que c'est à peine si des voix de femmes
peuvent descendre jusque-là. Il en résulte un effet saisissant et
tragique.
Celles du Petit-Picpus avaient fait faire un caveau sous leur
maître-autel pour la sépulture de leur communauté. Le gouvernement,
comme elles disent, ne permit pas que ce caveau reçût les cercueils.
Elles sortaient donc du couvent quand elles étaient mortes. Ceci les
affligeait et les consternait comme une infraction.
Elles avaient obtenu, consolation médiocre, d'être enterrées à une heure
spéciale et en un coin spécial dans l'ancien cimetière Vaugirard, qui
était fait d'une terre appartenant jadis à leur communauté.
Le jeudi ces religieuses entendent la grand'messe, vêpres et tous les
offices comme le dimanche. Elles observent en outre scrupuleusement
toutes les petites fêtes, inconnues aux gens du monde, que l'église
prodiguait autrefois en France et prodigue encore en Espagne et en
Italie. Leurs stations à la chapelle sont interminables. Quant au nombre
et à la durée de leurs prières, nous ne pouvons en donner une meilleure
idée qu'en citant le mot naïf de l'une d'elles: Les prières des
postulantes sont effrayantes, les prières des novices encore pires, et
les prières des professes encore pires.
Une fois par semaine, on assemble le chapitre; la prieure préside, les
mères vocales assistent. Chaque sœur vient à son tour s'agenouiller sur
la pierre, et confesser à haute voix, devant toutes, les fautes et les
péchés qu'elle a commis dans la semaine. Les mères vocales se consultent
après chaque confession, et infligent tout haut les pénitences.
Outre la confession à haute voix, pour laquelle on réserve toutes les
fautes un peu graves, elles ont pour les fautes vénielles ce qu'elles
appellent la coulpe. Faire sa coulpe, c'est se prosterner à plat
ventre durant l'office devant la prieure jusqu'à ce que celle-ci, qu'on
ne nomme jamais que notre mère, avertisse la patiente par un petit
coup frappé sur le bois de sa stalle qu'elle peut se relever. On fait sa
coulpe pour très peu de chose, un verre cassé, un voile déchiré, un
retard involontaire de quelques secondes à un office, une fausse note à
l'église, etc., cela suffit, on fait sa coulpe. La coulpe est toute
spontanée; c'est la coupable elle-même (ce mot est ici
étymologiquement à sa place) qui se juge et qui se l'inflige. Les jours
de fêtes et les dimanches il y a quatre mères chantres qui psalmodient
les offices devant un grand lutrin à quatre pupitres. Un jour une mère
chantre entonna un psaume qui commençait par Ecce, et, au lieu de
Ecce, dit à haute voix ces trois notes: ut, si, sol; elle subit pour
cette distraction une coulpe qui dura tout l'office. Ce qui rendait la
faute énorme, c'est que le chapitre avait ri.
Lorsqu'une religieuse est appelée au parloir, fût-ce la prieure, elle
baisse son voile de façon, l'on s'en souvient, à ne laisser voir que sa
bouche.
La prieure seule peut communiquer avec des étrangers. Les autres ne
peuvent voir que leur famille étroite, et très rarement. Si par hasard
une personne du dehors se présente pour voir une religieuse qu'elle a
connue ou aimée dans le monde, il faut toute une négociation. Si c'est
une femme, l'autorisation peut être quelquefois accordée, la religieuse
vient et on lui parle à travers les volets, lesquels ne s'ouvrent que
pour une mère ou une sœur. Il va sans dire que la permission est
toujours refusée aux hommes.
Telle est la règle de saint Benoît, aggravée par Martin Verga.
Ces religieuses ne sont point gaies, roses et fraîches comme le sont
souvent les filles des autres ordres. Elles sont pâles et graves. De
1825 à 1830 trois sont devenues folles.
English text
This convent, which in 1824 had already existed for many a long year in the Rue Petit-Picpus, was a community of Bernardines of the obedience of Martin Verga.
These Bernardines were attached, in consequence, not to Clairvaux, like
the Bernardine monks, but to Citeaux, like the Benedictine monks. In other
words, they were the subjects, not of Saint Bernard, but of Saint Benoit.
Any one who has turned over old folios to any extent knows that Martin
Verga founded in 1425 a congregation of Bernardines-Benedictines, with
Salamanca for the head of the order, and Alcala as the branch
establishment.
This congregation had sent out branches throughout all the Catholic
countries of Europe.
There is nothing unusual in the Latin Church in these grafts of one order
on another. To mention only a single order of Saint-Benoit, which is here
in question: there are attached to this order, without counting the
obedience of Martin Verga, four congregations,—two in Italy,
Mont-Cassin and Sainte-Justine of Padua; two in France, Cluny and
Saint-Maur; and nine orders,—Vallombrosa, Granmont, the Celestins,
the Camaldules, the Carthusians, the Humilies, the Olivateurs, the
Silvestrins, and lastly, Citeaux; for Citeaux itself, a trunk for other
orders, is only an offshoot of Saint-Benoit. Citeaux dates from Saint
Robert, Abbé de Molesme, in the diocese of Langres, in 1098. Now it was in
529 that the devil, having retired to the desert of Subiaco—he was
old—had he turned hermit?—was chased from the ancient temple
of Apollo, where he dwelt, by Saint-Benoit, then aged seventeen.
After the rule of the Carmelites, who go barefoot, wear a bit of willow on
their throats, and never sit down, the harshest rule is that of the
Bernardines-Benedictines of Martin Verga. They are clothed in black, with
a guimpe, which, in accordance with the express command of Saint-Benoit,
mounts to the chin. A robe of serge with large sleeves, a large woollen
veil, the guimpe which mounts to the chin cut square on the breast, the
band which descends over their brow to their eyes,—this is their
dress. All is black except the band, which is white. The novices wear the
same habit, but all in white. The professed nuns also wear a rosary at
their side.
The Bernardines-Benedictines of Martin Verga practise the Perpetual
Adoration, like the Benedictines called Ladies of the Holy Sacrament, who,
at the beginning of this century, had two houses in Paris,—one at
the Temple, the other in the Rue Neuve-Sainte-Genevieve. However, the
Bernardines-Benedictines of the Petit-Picpus, of whom we are speaking,
were a totally different order from the Ladies of the Holy Sacrament,
cloistered in the Rue Neuve-Sainte-Genevieve and at the Temple. There were
numerous differences in their rule; there were some in their costume. The
Bernardines-Benedictines of the Petit-Picpus wore the black guimpe, and
the Benedictines of the Holy Sacrament and of the Rue
Neuve-Sainte-Genevieve wore a white one, and had, besides, on their
breasts, a Holy Sacrament about three inches long, in silver gilt or
gilded copper. The nuns of the Petit-Picpus did not wear this Holy
Sacrament. The Perpetual Adoration, which was common to the house of the
Petit-Picpus and to the house of the Temple, leaves those two orders
perfectly distinct. Their only resemblance lies in this practice of the
Ladies of the Holy Sacrament and the Bernardines of Martin Verga, just as
there existed a similarity in the study and the glorification of all the
mysteries relating to the infancy, the life, and death of Jesus Christ and
the Virgin, between the two orders, which were, nevertheless, widely
separated, and on occasion even hostile. The Oratory of Italy, established
at Florence by Philip de Neri, and the Oratory of France, established by
Pierre de Berulle. The Oratory of France claimed the precedence, since
Philip de Neri was only a saint, while Berulle was a cardinal.
Let us return to the harsh Spanish rule of Martin Verga.
The Bernardines-Benedictines of this obedience fast all the year round,
abstain from meat, fast in Lent and on many other days which are peculiar
to them, rise from their first sleep, from one to three o'clock in the
morning, to read their breviary and chant matins, sleep in all seasons
between serge sheets and on straw, make no use of the bath, never light a
fire, scourge themselves every Friday, observe the rule of silence, speak
to each other only during the recreation hours, which are very brief, and
wear drugget chemises for six months in the year, from September 14th,
which is the Exaltation of the Holy Cross, until Easter. These six months
are a modification: the rule says all the year, but this drugget chemise,
intolerable in the heat of summer, produced fevers and nervous spasms. The
use of it had to be restricted. Even with this palliation, when the nuns
put on this chemise on the 14th of September, they suffer from fever for
three or four days. Obedience, poverty, chastity, perseverance in their
seclusion,—these are their vows, which the rule greatly aggravates.
The prioress is elected for three years by the mothers, who are called
meres vocales because they have a voice in the chapter. A prioress can
only be re-elected twice, which fixes the longest possible reign of a
prioress at nine years.
They never see the officiating priest, who is always hidden from them by a
serge curtain nine feet in height. During the sermon, when the preacher is
in the chapel, they drop their veils over their faces. They must always
speak low, walk with their eyes on the ground and their heads bowed. One
man only is allowed to enter the convent,—the archbishop of the
diocese.
There is really one other,—the gardener. But he is always an old
man, and, in order that he may always be alone in the garden, and that the
nuns may be warned to avoid him, a bell is attached to his knee.
Their submission to the prioress is absolute and passive. It is the
canonical subjection in the full force of its abnegation. As at the voice
of Christ, ut voci Christi, at a gesture, at the first sign, ad nutum, ad
primum signum, immediately, with cheerfulness, with perseverance, with a
certain blind obedience, prompte, hilariter, perseveranter et caeca quadam
obedientia, as the file in the hand of the workman, quasi limam in manibus
fabri, without power to read or to write without express permission,
legere vel scribere non addiscerit sine expressa superioris licentia.
Each one of them in turn makes what they call reparation. The reparation
is the prayer for all the sins, for all the faults, for all the
dissensions, for all the violations, for all the iniquities, for all the
crimes committed on earth. For the space of twelve consecutive hours, from
four o'clock in the afternoon till four o'clock in the morning, or from
four o'clock in the morning until four o'clock in the afternoon, the
sister who is making reparation remains on her knees on the stone before
the Holy Sacrament, with hands clasped, a rope around her neck. When her
fatigue becomes unendurable, she prostrates herself flat on her face
against the earth, with her arms outstretched in the form of a cross; this
is her only relief. In this attitude she prays for all the guilty in the
universe. This is great to sublimity.
As this act is performed in front of a post on which burns a candle, it is
called without distinction, to make reparation or to be at the post. The
nuns even prefer, out of humility, this last expression, which contains an
idea of torture and abasement.
To make reparation is a function in which the whole soul is absorbed. The
sister at the post would not turn round were a thunderbolt to fall
directly behind her.
Besides this, there is always a sister kneeling before the Holy Sacrament.
This station lasts an hour. They relieve each other like soldiers on
guard. This is the Perpetual Adoration.
The prioresses and the mothers almost always bear names stamped with
peculiar solemnity, recalling, not the saints and martyrs, but moments in
the life of Jesus Christ: as Mother Nativity, Mother Conception, Mother
Presentation, Mother Passion. But the names of saints are not interdicted.
When one sees them, one never sees anything but their mouths.
All their teeth are yellow. No tooth-brush ever entered that convent.
Brushing one's teeth is at the top of a ladder at whose bottom is the loss
of one's soul.
They never say my. They possess nothing of their own, and they must not
attach themselves to anything. They call everything our; thus: our veil,
our chaplet; if they were speaking of their chemise, they would say our
chemise. Sometimes they grow attached to some petty object,—to a
book of hours, a relic, a medal that has been blessed. As soon as they
become aware that they are growing attached to this object, they must give
it up. They recall the words of Saint Therese, to whom a great lady said,
as she was on the point of entering her order, "Permit me, mother, to send
for a Bible to which I am greatly attached." "Ah, you are attached to
something! In that case, do not enter our order!"
Every person whatever is forbidden to shut herself up, to have a place of
her own, a chamber. They live with their cells open. When they meet, one
says, "Blessed and adored be the most Holy Sacrament of the altar!" The
other responds, "Forever." The same ceremony when one taps at the other's
door. Hardly has she touched the door when a soft voice on the other side
is heard to say hastily, "Forever!" Like all practices, this becomes
mechanical by force of habit; and one sometimes says forever before the
other has had time to say the rather long sentence, "Praised and adored be
the most Holy Sacrament of the altar."
Among the Visitandines the one who enters says: "Ave Maria," and the one
whose cell is entered says, "Gratia plena." It is their way of saying good
day, which is in fact full of grace.
At each hour of the day three supplementary strokes sound from the church
bell of the convent. At this signal prioress, vocal mothers, professed
nuns, lay-sisters, novices, postulants, interrupt what they are saying,
what they are doing, or what they are thinking, and all say in unison if
it is five o'clock, for instance, "At five o'clock and at all hours
praised and adored be the most Holy Sacrament of the altar!" If it is
eight o'clock, "At eight o'clock and at all hours!" and so on, according
to the hour.
This custom, the object of which is to break the thread of thought and to
lead it back constantly to God, exists in many communities; the formula
alone varies. Thus at The Infant Jesus they say, "At this hour and at
every hour may the love of Jesus kindle my heart!" The
Bernardines-Benedictines of Martin Verga, cloistered fifty years ago at
Petit-Picpus, chant the offices to a solemn psalmody, a pure Gregorian
chant, and always with full voice during the whole course of the office.
Everywhere in the missal where an asterisk occurs they pause, and say in a
low voice, "Jesus-Marie-Joseph." For the office of the dead they adopt a
tone so low that the voices of women can hardly descend to such a depth.
The effect produced is striking and tragic.
The nuns of the Petit-Picpus had made a vault under their grand altar for
the burial of their community. The Government, as they say, does not
permit this vault to receive coffins so they leave the convent when they
die. This is an affliction to them, and causes them consternation as an
infraction of the rules.
They had obtained a mediocre consolation at best,—permission to be
interred at a special hour and in a special corner in the ancient
Vaugirard cemetery, which was made of land which had formerly belonged to
their community.
On Fridays the nuns hear high mass, vespers, and all the offices, as on
Sunday. They scrupulously observe in addition all the little festivals
unknown to people of the world, of which the Church of France was so
prodigal in the olden days, and of which it is still prodigal in Spain and
Italy. Their stations in the chapel are interminable. As for the number
and duration of their prayers we can convey no better idea of them than by
quoting the ingenuous remark of one of them: "The prayers of the
postulants are frightful, the prayers of the novices are still worse, and
the prayers of the professed nuns are still worse."
Once a week the chapter assembles: the prioress presides; the vocal
mothers assist. Each sister kneels in turn on the stones, and confesses
aloud, in the presence of all, the faults and sins which she has committed
during the week. The vocal mothers consult after each confession and
inflict the penance aloud.
Besides this confession in a loud tone, for which all faults in the least
serious are reserved, they have for their venial offences what they call
the coulpe. To make one's coulpe means to prostrate one's self flat on
one's face during the office in front of the prioress until the latter,
who is never called anything but our mother, notifies the culprit by a
slight tap of her foot against the wood of her stall that she can rise.
The coulpe or peccavi, is made for a very small matter—a broken
glass, a torn veil, an involuntary delay of a few seconds at an office, a
false note in church, etc.; this suffices, and the coulpe is made. The
coulpe is entirely spontaneous; it is the culpable person herself (the
word is etymologically in its place here) who judges herself and inflicts
it on herself. On festival days and Sundays four mother precentors intone
the offices before a large reading-desk with four places. One day one of
the mother precentors intoned a psalm beginning with Ecce, and instead of
Ecce she uttered aloud the three notes do si sol; for this piece of
absent-mindedness she underwent a coulpe which lasted during the whole
service: what rendered the fault enormous was the fact that the chapter
had laughed.
When a nun is summoned to the parlor, even were it the prioress herself,
she drops her veil, as will be remembered, so that only her mouth is
visible.
The prioress alone can hold communication with strangers. The others can
see only their immediate family, and that very rarely. If, by chance, an
outsider presents herself to see a nun, or one whom she has known and
loved in the outer world, a regular series of negotiations is required. If
it is a woman, the authorization may sometimes be granted; the nun comes,
and they talk to her through the shutters, which are opened only for a
mother or sister. It is unnecessary to say that permission is always
refused to men.
Such is the rule of Saint-Benoit, aggravated by Martin Verga.
These nuns are not gay, rosy, and fresh, as the daughters of other orders
often are. They are pale and grave. Between 1825 and 1830 three of them
went mad.