Volume 2/Book 2/Chapter 3

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Les Misérables, Volume 2: Cosette, Book 2nd: The Ship Orion, Chapter 3: The Ankle-Chain Must Have Undergone a Certain Preparatory Manipulation to be Thus Broken with a Blow from a Hammer
(Tome 2: Cosette, Livre 2ième: Le vaisseau L'Orion, Chapitre 3: Qu'il fallait que la chaîne de la manille eut subit un certain travail préparatoire pour être ainsi brisée d'un coup de marteau)

General notes on this chapter

French text

Vers la fin d'octobre de cette même année 1823, les habitants de Toulon virent rentrer dans leur port, à la suite d'un gros temps et pour réparer quelques avaries, le vaisseau l' Orion qui a été plus tard employé à Brest comme vaisseau-école et qui faisait alors partie de l'escadre de la Méditerranée.

Ce bâtiment, tout éclopé qu'il était, car la mer l'avait malmené, fit de l'effet en entrant dans la rade. Il portait je ne sais plus quel pavillon qui lui valut un salut réglementaire de onze coups de canon, rendus par lui coup pour coup; total: vingt-deux. On a calculé qu'en salves, politesses royales et militaires, échanges de tapages courtois, signaux d'étiquette, formalités de rades et de citadelles, levers et couchers de soleil salués tous les jours par toutes les forteresses et tous les navires de guerre, ouvertures et fermetures de portes, etc., etc., le monde civilisé tirait à poudre par toute la terre, toutes les vingt-quatre heures, cent cinquante mille coups de canon inutiles. À six francs le coup de canon, cela fait neuf cent mille francs par jour, trois cents millions par an, qui s'en vont en fumée. Ceci n'est qu'un détail. Pendant ce temps-là les pauvres meurent de faim.

L'année 1823 était ce que la restauration a appelé «l'époque de la guerre d'Espagne.»

Cette guerre contenait beaucoup d'événements dans un seul, et force singularités. Une grosse affaire de famille pour la maison de Bourbon; la branche de France secourant et protégeant la branche de Madrid, c'est-à-dire faisant acte d'aînesse; un retour apparent à nos traditions nationales compliqué de servitude et de sujétion aux cabinets du nord; Mr le duc d'Angoulême, surnommé par les feuilles libérales le héros d'Andujar, comprimant, dans une attitude triomphale un peu contrariée par son air paisible, le vieux terrorisme fort réel du saint-office aux prises avec le terrorisme chimérique des libéraux; les sans-culottes ressuscités au grand effroi des douairières sous le nom de descamisados; le monarchisme faisant obstacle au progrès qualifié anarchie; les théories de 89 brusquement interrompues dans la sape; un holà européen intimé à l'idée française faisant son tour du monde; à côté du fils de France généralissime, le prince de Carignan, depuis Charles-Albert, s'enrôlant dans cette croisade des rois contre les peuples comme volontaire avec des épaulettes de grenadier en laine rouge; les soldats de l'empire se remettant en campagne, mais après huit années de repos, vieillis, tristes, et sous la cocarde blanche; le drapeau tricolore agité à l'étranger par une héroïque poignée de Français comme le drapeau blanc l'avait été à Coblentz trente ans auparavant; les moines mêlés à nos troupiers; l'esprit de liberté et de nouveauté mis à la raison par les bayonnettes; les principes matés à coups de canon; la France défaisant par ses armes ce qu'elle avait fait par son esprit; du reste, les chefs ennemis vendus, les soldats hésitants, les villes assiégées par des millions; point de périls militaires et pourtant des explosions possibles, comme dans toute mine surprise et envahie; peu de sang versé, peu d'honneur conquis, de la honte pour quelques-uns, de la gloire pour personne; telle fut cette guerre, faite par des princes qui descendaient de Louis XIV et conduite par des généraux qui sortaient de Napoléon. Elle eut ce triste sort de ne rappeler ni la grande guerre ni la grande politique.

Quelques faits d'armes furent sérieux; la prise du Trocadéro, entre autres, fut une belle action militaire; mais en somme, nous le répétons, les trompettes de cette guerre rendent un son fêlé, l'ensemble fut suspect, l'histoire approuve la France dans sa difficulté d'acceptation de ce faux triomphe. Il parut évident que certains officiers espagnols chargés de la résistance cédèrent trop aisément, l'idée de corruption se dégagea de la victoire; il sembla qu'on avait plutôt gagné les généraux que les batailles, et le soldat vainqueur rentra humilié. Guerre diminuante en effet où l'on put lire Banque de France dans les plis du drapeau. Des soldats de la guerre de 1808, sur lesquels s'était formidablement écroulée Saragosse, fronçaient le sourcil en 1823 devant l'ouverture facile des citadelles, et se prenaient à regretter Palafox. C'est l'humeur de la France d'aimer encore mieux avoir devant elle Rostopchine que Ballesteros.

À un point de vue plus grave encore, et sur lequel il convient d'insister aussi, cette guerre, qui froissait en France l'esprit militaire, indignait l'esprit démocratique. C'était une entreprise d'asservissement. Dans cette campagne, le but du soldat français, fils de la démocratie, était la conquête d'un joug pour autrui. Contresens hideux. La France est faite pour réveiller l'âme des peuples, non pour l'étouffer. Depuis 1792, toutes les révolutions de l'Europe sont la révolution française; la liberté rayonne de France. C'est là un fait solaire. Aveugle qui ne le voit pas! c'est Bonaparte qui l'a dit.

La guerre de 1823, attentat à la généreuse nation espagnole, était donc en même temps un attentat à la révolution française. Cette voie de fait monstrueuse, c'était la France qui la commettait; de force; car, en dehors des guerres libératrices, tout ce que font les armées, elles le font de force. Le mot obéissance passive l'indique. Une armée est un étrange chef-d'œuvre de combinaison où la force résulte d'une somme énorme d'impuissance. Ainsi s'explique la guerre, faite par l'humanité contre l'humanité malgré l'humanité.

Quant aux Bourbons, la guerre de 1823 leur fut fatale. Ils la prirent pour un succès. Ils ne virent point quel danger il y a à faire tuer une idée par une consigne. Ils se méprirent dans leur naïveté au point d'introduire dans leur établissement comme élément de force l'immense affaiblissement d'un crime. L'esprit de guet-apens entra dans leur politique. 1830 germa dans 1823. La campagne d'Espagne devint dans leurs conseils un argument pour les coups de force et pour les aventures de droit divin. La France, ayant rétabli el rey neto en Espagne, pouvait bien rétablir le roi absolu chez elle. Ils tombèrent dans cette redoutable erreur de prendre l'obéissance du soldat pour le consentement de la nation. Cette confiance-là perd les trônes. Il ne faut s'endormir, ni à l'ombre d'un mancenillier ni à l'ombre d'une armée.

Revenons au navire l' Orion.

Pendant les opérations de l'armée commandée par le prince-généralissime, une escadre croisait dans la Méditerranée. Nous venons de dire que l'Orion était de cette escadre et qu'il fut ramené par des événements de mer dans le port de Toulon.

La présence d'un vaisseau de guerre dans un port a je ne sais quoi qui appelle et qui occupe la foule. C'est que cela est grand, et que la foule aime ce qui est grand.

Un vaisseau de ligne est une des plus magnifiques rencontres qu'ait le génie de l'homme avec la puissance de la nature.

Un vaisseau de ligne est composé à la fois de ce qu'il y a de plus lourd et de ce qu'il y a de plus léger, parce qu'il a affaire en même temps aux trois formes de la substance, au solide, au liquide, au fluide, et qu'il doit lutter contre toutes les trois. Il a onze griffes de fer pour saisir le granit au fond de la mer, et plus d'ailes et plus d'antennes que la bigaille pour prendre le vent dans les nuées. Son haleine sort par ses cent vingt canons comme par des clairons énormes, et répond fièrement à la foudre. L'océan cherche à l'égarer dans l'effrayante similitude de ses vagues, mais le vaisseau a son âme, sa boussole, qui le conseille et lui montre toujours le nord. Dans les nuits noires ses fanaux suppléent aux étoiles. Ainsi, contre le vent il a la corde et la toile, contre l'eau le bois, contre le rocher le fer, le cuivre et le plomb, contre l'ombre la lumière, contre l'immensité une aiguille.

Si l'on veut se faire une idée de toutes ces proportions gigantesques dont l'ensemble constitue le vaisseau de ligne, on n'a qu'à entrer sous une des cales couvertes, à six étages, des ports de Brest ou de Toulon. Les vaisseaux en construction sont là sous cloche, pour ainsi dire. Cette poutre colossale, c'est une vergue; cette grosse colonne de bois couchée à terre à perte de vue, c'est le grand mât. À le prendre de sa racine dans la cale à sa cime dans la nuée, il est long de soixante toises, et il a trois pieds de diamètre à sa base. Le grand mât anglais s'élève à deux cent dix-sept pieds au-dessus de la ligne de flottaison. La marine de nos pères employait des câbles, la nôtre emploie des chaînes. Le simple tas de chaînes d'un vaisseau de cent canons a quatre pieds de haut, vingt pieds de large, huit pieds de profondeur. Et pour faire ce vaisseau, combien faut-il de bois? Trois mille stères. C'est une forêt qui flotte.

Et encore, qu'on le remarque bien, il ne s'agit ici que du bâtiment militaire d'il y a quarante ans, du simple navire à voiles; la vapeur, alors dans l'enfance, a depuis ajouté de nouveaux miracles à ce prodige qu'on appelle le vaisseau de guerre. À l'heure qu'il est, par exemple, le navire mixte à hélice est une machine surprenante traînée par une voilure de trois mille mètres carrés de surface et par une chaudière de la force de deux mille cinq cents chevaux.

Sans parler de ces merveilles nouvelles, l'ancien navire de Christophe Colomb et de Ruyter est un des grands chefs-d'œuvre de l'homme. Il est inépuisable en force comme l'infini en souffles, il emmagasine le vent dans sa voile, il est précis dans l'immense diffusion des vagues, il flotte et il règne.

Il vient une heure pourtant où la rafale brise comme une paille cette vergue de soixante pieds de long, où le vent ploie comme un jonc ce mât de quatre cents pieds de haut, où cette ancre qui pèse dix milliers se tord dans la gueule de la vague comme l'hameçon d'un pêcheur dans la mâchoire d'un brochet, où ces canons monstrueux poussent des rugissements plaintifs et inutiles que l'ouragan emporte dans le vide et dans la nuit, où toute cette puissance et toute cette majesté s'abîment dans une puissance et dans une majesté supérieures. Toutes les fois qu'une force immense se déploie pour aboutir à une immense faiblesse, cela fait rêver les hommes. De là, dans les ports, les curieux qui abondent, sans qu'ils s'expliquent eux-mêmes parfaitement pourquoi, autour de ces merveilleuses machines de guerre et de navigation.

Tous les jours donc, du matin au soir, les quais, les musoirs et les jetées du port de Toulon étaient couverts d'une quantité d'oisifs et de badauds, comme on dit à Paris, ayant pour affaire de regarder l'Orion.

L'Orion était un navire malade depuis longtemps. Dans ses navigations antérieures, des couches épaisses de coquillages s'étaient amoncelées sur sa carène au point de lui faire perdre la moitié de sa marche; on l'avait mis à sec l'année précédente pour gratter ces coquillages, puis il avait repris la mer. Mais ce grattage avait altéré les boulonnages de la carène. À la hauteur des Baléares, le bordé s'était fatigué et ouvert, et, comme le vaigrage ne se faisait pas alors en tôle, le navire avait fait de l'eau. Un violent coup d'équinoxe était survenu, qui avait défoncé à bâbord la poulaine et un sabord et endommagé le porte-haubans de misaine. À la suite de ces avaries, l' Orion avait regagné Toulon.

Il était mouillé près de l'Arsenal. Il était en armement et on le réparait. La coque n'avait pas été endommagée à tribord, mais quelques bordages y étaient décloués çà et là, selon l'usage, pour laisser pénétrer de l'air dans la carcasse.

Un matin la foule qui le contemplait fut témoin d'un accident.

L'équipage était occupé à enverguer les voiles. Le gabier chargé de prendre l'empointure du grand hunier tribord perdit l'équilibre. On le vit chanceler, la multitude amassée sur le quai de l'Arsenal jeta un cri, la tête emporta le corps, l'homme tourna autour de la vergue, les mains étendues vers l'abîme; il saisit, au passage, le faux marchepied d'une main d'abord, puis de l'autre, et il y resta suspendu. La mer était au-dessous de lui à une profondeur vertigineuse. La secousse de sa chute avait imprimé au faux marchepied un violent mouvement d'escarpolette. L'homme allait et venait au bout de cette corde comme la pierre d'une fronde.

Aller à son secours, c'était courir un risque effrayant. Aucun des matelots, tous pêcheurs de la côte nouvellement levés pour le service, n'osait s'y aventurer. Cependant le malheureux gabier se fatiguait; on ne pouvait voir son angoisse sur son visage, mais on distinguait dans tous ses membres son épuisement. Ses bras se tendaient dans un tiraillement horrible. Chaque effort qu'il faisait pour remonter ne servait qu'à augmenter les oscillations du faux marchepied. Il ne criait pas de peur de perdre de la force. On n'attendait plus que la minute où il lâcherait la corde et par instants toutes les têtes se détournaient afin de ne pas le voir passer. Il y a des moments où un bout de corde, une perche, une branche d'arbre, c'est la vie même, et c'est une chose affreuse de voir un être vivant s'en détacher et tomber comme un fruit mûr.

Tout à coup, on aperçut un homme qui grimpait dans le gréement avec l'agilité d'un chat-tigre. Cet homme était vêtu de rouge, c'était un forçat; il avait un bonnet vert, c'était un forçat à vie. Arrivé à la hauteur de la hune, un coup de vent emporta son bonnet et laissa voir une tête toute blanche, ce n'était pas un jeune homme.

Un forçat en effet, employé à bord avec une corvée du bagne, avait dès le premier moment couru à l'officier de quart et au milieu du trouble et de l'hésitation de l'équipage, pendant que tous les matelots tremblaient et reculaient, il avait demandé à l'officier la permission de risquer sa vie pour sauver le gabier. Sur un signe affirmatif de l'officier, il avait rompu d'un coup de marteau la chaîne rivée à la manille de son pied, puis il avait pris une corde, et il s'était élancé dans les haubans. Personne ne remarqua en cet instant-là avec quelle facilité cette chaîne fut brisée. Ce ne fut que plus tard qu'on s'en souvint. En un clin d'œil il fut sur la vergue. Il s'arrêta quelques secondes et parut la mesurer du regard. Ces secondes, pendant lesquelles le vent balançait le gabier à l'extrémité d'un fil, semblèrent des siècles à ceux qui regardaient. Enfin le forçat leva les yeux au ciel, et fit un pas en avant. La foule respira. On le vit parcourir la vergue en courant. Parvenu à la pointe, il y attacha un bout de la corde qu'il avait apportée, et laissa pendre l'autre bout, puis il se mit à descendre avec les mains le long de cette corde, et alors ce fut une inexplicable angoisse, au lieu d'un homme suspendu sur le gouffre, on en vit deux.

On eût dit une araignée venant saisir une mouche; seulement ici l'araignée apportait la vie et non la mort. Dix mille regards étaient fixés sur ce groupe. Pas un cri, pas une parole, le même frémissement fronçait tous les sourcils. Toutes les bouches retenaient leur haleine, comme si elles eussent craint d'ajouter le moindre souffle au vent qui secouait les deux misérables.

Cependant le forçat était parvenu à s'affaler près du matelot. Il était temps; une minute de plus, l'homme, épuisé et désespéré, se laissait tomber dans l'abîme; le forçat l'avait amarré solidement avec la corde à laquelle il se tenait d'une main pendant qu'il travaillait de l'autre. Enfin on le vit remonter sur la vergue et y haler le matelot; il le soutint là un instant pour lui laisser reprendre des forces, puis il le saisit dans ses bras et le porta, en marchant sur la vergue jusqu'au chouquet, et de là dans la hune où il le laissa dans les mains de ses camarades.

À cet instant la foule applaudit; il y eut de vieux argousins de chiourme qui pleurèrent, les femmes s'embrassaient sur le quai, et l'on entendit toutes les voix crier avec une sorte de fureur attendrie: «La grâce de cet homme!»

Lui, cependant, s'était mis en devoir de redescendre immédiatement pour rejoindre sa corvée. Pour être plus promptement arrivé, il se laissa glisser dans le gréement et se mit à courir sur une basse vergue. Tous les yeux le suivaient. À un certain moment, on eut peur; soit qu'il fût fatigué, soit que la tête lui tournât, on crut le voir hésiter et chanceler. Tout à coup la foule poussa un grand cri, le forçat venait de tomber à la mer.

La chute était périlleuse. La frégate l' Algésiras était mouillée auprès de l' Orion, et le pauvre galérien était tombé entre les deux navires. Il était à craindre qu'il ne glissât sous l'un ou sous l'autre. Quatre hommes se jetèrent en hâte dans une embarcation. La foule les encourageait, l'anxiété était de nouveau dans toutes les âmes. L'homme n'était pas remonté à la surface. Il avait disparu dans la mer sans y faire un pli, comme s'il fût tombé dans une tonne d'huile. On sonda, on plongea. Ce fut en vain. On chercha jusqu'au soir; on ne retrouva pas même le corps.

Le lendemain, le journal de Toulon imprimait ces quelques livres:—«17 novembre 1823.—Hier, un forçat, de corvée à bord de l'Orion, en revenant de porter secours à un matelot, est tombé à la mer et s'est noyé. On n'a pu retrouver son cadavre. On présume qu'il se sera engagé sous le pilotis de la pointe de l'Arsenal. Cet homme était écroué sous le nº 9430 et se nommait Jean Valjean.»

English text

Towards the end of October, in that same year, 1823, the inhabitants of Toulon beheld the entry into their port, after heavy weather, and for the purpose of repairing some damages, of the ship Orion, which was employed later at Brest as a school-ship, and which then formed a part of the Mediterranean squadron.

This vessel, battered as it was,—for the sea had handled it roughly,—produced a fine effect as it entered the roads. It flew some colors which procured for it the regulation salute of eleven guns, which it returned, shot for shot; total, twenty-two. It has been calculated that what with salvos, royal and military politenesses, courteous exchanges of uproar, signals of etiquette, formalities of roadsteads and citadels, sunrises and sunsets, saluted every day by all fortresses and all ships of war, openings and closings of ports, etc., the civilized world, discharged all over the earth, in the course of four and twenty hours, one hundred and fifty thousand useless shots. At six francs the shot, that comes to nine hundred thousand francs a day, three hundred millions a year, which vanish in smoke. This is a mere detail. All this time the poor were dying of hunger.

The year 1823 was what the Restoration called "the epoch of the Spanish war."

This war contained many events in one, and a quantity of peculiarities. A grand family affair for the house of Bourbon; the branch of France succoring and protecting the branch of Madrid, that is to say, performing an act devolving on the elder; an apparent return to our national traditions, complicated by servitude and by subjection to the cabinets of the North; M. le Duc d'Angoulême, surnamed by the liberal sheets the hero of Andujar, compressing in a triumphal attitude that was somewhat contradicted by his peaceable air, the ancient and very powerful terrorism of the Holy Office at variance with the chimerical terrorism of the liberals; the sansculottes resuscitated, to the great terror of dowagers, under the name of descamisados; monarchy opposing an obstacle to progress described as anarchy; the theories of '89 roughly interrupted in the sap; a European halt, called to the French idea, which was making the tour of the world; beside the son of France as generalissimo, the Prince de Carignan, afterwards Charles Albert, enrolling himself in that crusade of kings against people as a volunteer, with grenadier epaulets of red worsted; the soldiers of the Empire setting out on a fresh campaign, but aged, saddened, after eight years of repose, and under the white cockade; the tricolored standard waved abroad by a heroic handful of Frenchmen, as the white standard had been thirty years earlier at Coblentz; monks mingled with our troops; the spirit of liberty and of novelty brought to its senses by bayonets; principles slaughtered by cannonades; France undoing by her arms that which she had done by her mind; in addition to this, hostile leaders sold, soldiers hesitating, cities besieged by millions; no military perils, and yet possible explosions, as in every mine which is surprised and invaded; but little bloodshed, little honor won, shame for some, glory for no one. Such was this war, made by the princes descended from Louis XIV., and conducted by generals who had been under Napoleon. Its sad fate was to recall neither the grand war nor grand politics.

Some feats of arms were serious; the taking of the Trocadero, among others, was a fine military action; but after all, we repeat, the trumpets of this war give back a cracked sound, the whole effect was suspicious; history approves of France for making a difficulty about accepting this false triumph. It seemed evident that certain Spanish officers charged with resistance yielded too easily; the idea of corruption was connected with the victory; it appears as though generals and not battles had been won, and the conquering soldier returned humiliated. A debasing war, in short, in which the Bank of France could be read in the folds of the flag.

Soldiers of the war of 1808, on whom Saragossa had fallen in formidable ruin, frowned in 1823 at the easy surrender of citadels, and began to regret Palafox. It is the nature of France to prefer to have Rostopchine rather than Ballesteros in front of her.

From a still more serious point of view, and one which it is also proper to insist upon here, this war, which wounded the military spirit of France, enraged the democratic spirit. It was an enterprise of inthralment. In that campaign, the object of the French soldier, the son of democracy, was the conquest of a yoke for others. A hideous contradiction. France is made to arouse the soul of nations, not to stifle it. All the revolutions of Europe since 1792 are the French Revolution: liberty darts rays from France. That is a solar fact. Blind is he who will not see! It was Bonaparte who said it.

The war of 1823, an outrage on the generous Spanish nation, was then, at the same time, an outrage on the French Revolution. It was France who committed this monstrous violence; by foul means, for, with the exception of wars of liberation, everything that armies do is by foul means. The words passive obedience indicate this. An army is a strange masterpiece of combination where force results from an enormous sum of impotence. Thus is war, made by humanity against humanity, despite humanity, explained.

As for the Bourbons, the war of 1823 was fatal to them. They took it for a success. They did not perceive the danger that lies in having an idea slain to order. They went astray, in their innocence, to such a degree that they introduced the immense enfeeblement of a crime into their establishment as an element of strength. The spirit of the ambush entered into their politics. 1830 had its germ in 1823. The Spanish campaign became in their counsels an argument for force and for adventures by right Divine. France, having re-established elrey netto in Spain, might well have re-established the absolute king at home. They fell into the alarming error of taking the obedience of the soldier for the consent of the nation. Such confidence is the ruin of thrones. It is not permitted to fall asleep, either in the shadow of a machineel tree, nor in the shadow of an army.

Let us return to the ship Orion.

During the operations of the army commanded by the prince generalissimo, a squadron had been cruising in the Mediterranean. We have just stated that the Orion belonged to this fleet, and that accidents of the sea had brought it into port at Toulon.

The presence of a vessel of war in a port has something about it which attracts and engages a crowd. It is because it is great, and the crowd loves what is great.

A ship of the line is one of the most magnificent combinations of the genius of man with the powers of nature.

A ship of the line is composed, at the same time, of the heaviest and the lightest of possible matter, for it deals at one and the same time with three forms of substance,—solid, liquid, and fluid,—and it must do battle with all three. It has eleven claws of iron with which to seize the granite on the bottom of the sea, and more wings and more antennae than winged insects, to catch the wind in the clouds. Its breath pours out through its hundred and twenty cannons as through enormous trumpets, and replies proudly to the thunder. The ocean seeks to lead it astray in the alarming sameness of its billows, but the vessel has its soul, its compass, which counsels it and always shows it the north. In the blackest nights, its lanterns supply the place of the stars. Thus, against the wind, it has its cordage and its canvas; against the water, wood; against the rocks, its iron, brass, and lead; against the shadows, its light; against immensity, a needle.

If one wishes to form an idea of all those gigantic proportions which, taken as a whole, constitute the ship of the line, one has only to enter one of the six-story covered construction stocks, in the ports of Brest or Toulon. The vessels in process of construction are under a bell-glass there, as it were. This colossal beam is a yard; that great column of wood which stretches out on the earth as far as the eye can reach is the main-mast. Taking it from its root in the stocks to its tip in the clouds, it is sixty fathoms long, and its diameter at its base is three feet. The English main-mast rises to a height of two hundred and seventeen feet above the water-line. The navy of our fathers employed cables, ours employs chains. The simple pile of chains on a ship of a hundred guns is four feet high, twenty feet in breadth, and eight feet in depth. And how much wood is required to make this ship? Three thousand cubic metres. It is a floating forest.

And moreover, let this be borne in mind, it is only a question here of the military vessel of forty years ago, of the simple sailing-vessel; steam, then in its infancy, has since added new miracles to that prodigy which is called a war vessel. At the present time, for example, the mixed vessel with a screw is a surprising machine, propelled by three thousand square metres of canvas and by an engine of two thousand five hundred horse-power.

Not to mention these new marvels, the ancient vessel of Christopher Columbus and of De Ruyter is one of the masterpieces of man. It is as inexhaustible in force as is the Infinite in gales; it stores up the wind in its sails, it is precise in the immense vagueness of the billows, it floats, and it reigns.

There comes an hour, nevertheless, when the gale breaks that sixty-foot yard like a straw, when the wind bends that mast four hundred feet tall, when that anchor, which weighs tens of thousands, is twisted in the jaws of the waves like a fisherman's hook in the jaws of a pike, when those monstrous cannons utter plaintive and futile roars, which the hurricane bears forth into the void and into night, when all that power and all that majesty are engulfed in a power and majesty which are superior.

Every time that immense force is displayed to culminate in an immense feebleness it affords men food for thought, Hence in the ports curious people abound around these marvellous machines of war and of navigation, without being able to explain perfectly to themselves why. Every day, accordingly, from morning until night, the quays, sluices, and the jetties of the port of Toulon were covered with a multitude of idlers and loungers, as they say in Paris, whose business consisted in staring at the Orion.

The Orion was a ship that had been ailing for a long time; in the course of its previous cruises thick layers of barnacles had collected on its keel to such a degree as to deprive it of half its speed; it had gone into the dry dock the year before this, in order to have the barnacles scraped off, then it had put to sea again; but this cleaning had affected the bolts of the keel: in the neighborhood of the Balearic Isles the sides had been strained and had opened; and, as the plating in those days was not of sheet iron, the vessel had sprung a leak. A violent equinoctial gale had come up, which had first staved in a grating and a porthole on the larboard side, and damaged the foretop-gallant-shrouds; in consequence of these injuries, the Orion had run back to Toulon.

It anchored near the Arsenal; it was fully equipped, and repairs were begun. The hull had received no damage on the starboard, but some of the planks had been unnailed here and there, according to custom, to permit of air entering the hold.

One morning the crowd which was gazing at it witnessed an accident.

The crew was busy bending the sails; the topman, who had to take the upper corner of the main-top-sail on the starboard, lost his balance; he was seen to waver; the multitude thronging the Arsenal quay uttered a cry; the man's head overbalanced his body; the man fell around the yard, with his hands outstretched towards the abyss; on his way he seized the footrope, first with one hand, then with the other, and remained hanging from it: the sea lay below him at a dizzy depth; the shock of his fall had imparted to the foot-rope a violent swinging motion; the man swayed back and forth at the end of that rope, like a stone in a sling.

It was incurring a frightful risk to go to his assistance; not one of the sailors, all fishermen of the coast, recently levied for the service, dared to attempt it. In the meantime, the unfortunate topman was losing his strength; his anguish could not be discerned on his face, but his exhaustion was visible in every limb; his arms were contracted in horrible twitchings; every effort which he made to re-ascend served but to augment the oscillations of the foot-rope; he did not shout, for fear of exhausting his strength. All were awaiting the minute when he should release his hold on the rope, and, from instant to instant, heads were turned aside that his fall might not be seen. There are moments when a bit of rope, a pole, the branch of a tree, is life itself, and it is a terrible thing to see a living being detach himself from it and fall like a ripe fruit.

All at once a man was seen climbing into the rigging with the agility of a tiger-cat; this man was dressed in red; he was a convict; he wore a green cap; he was a life convict. On arriving on a level with the top, a gust of wind carried away his cap, and allowed a perfectly white head to be seen: he was not a young man.

A convict employed on board with a detachment from the galleys had, in fact, at the very first instant, hastened to the officer of the watch, and, in the midst of the consternation and the hesitation of the crew, while all the sailors were trembling and drawing back, he had asked the officer's permission to risk his life to save the topman; at an affirmative sign from the officer he had broken the chain riveted to his ankle with one blow of a hammer, then he had caught up a rope, and had dashed into the rigging: no one noticed, at the instant, with what ease that chain had been broken; it was only later on that the incident was recalled.

In a twinkling he was on the yard; he paused for a few seconds and appeared to be measuring it with his eye; these seconds, during which the breeze swayed the topman at the extremity of a thread, seemed centuries to those who were looking on. At last, the convict raised his eyes to heaven and advanced a step: the crowd drew a long breath. He was seen to run out along the yard: on arriving at the point, he fastened the rope which he had brought to it, and allowed the other end to hang down, then he began to descend the rope, hand over hand, and then,—and the anguish was indescribable,—instead of one man suspended over the gulf, there were two.

One would have said it was a spider coming to seize a fly, only here the spider brought life, not death. Ten thousand glances were fastened on this group; not a cry, not a word; the same tremor contracted every brow; all mouths held their breath as though they feared to add the slightest puff to the wind which was swaying the two unfortunate men.

In the meantime, the convict had succeeded in lowering himself to a position near the sailor. It was high time; one minute more, and the exhausted and despairing man would have allowed himself to fall into the abyss. The convict had moored him securely with the cord to which he clung with one hand, while he was working with the other. At last, he was seen to climb back on the yard, and to drag the sailor up after him; he held him there a moment to allow him to recover his strength, then he grasped him in his arms and carried him, walking on the yard himself to the cap, and from there to the main-top, where he left him in the hands of his comrades.

At that moment the crowd broke into applause: old convict-sergeants among them wept, and women embraced each other on the quay, and all voices were heard to cry with a sort of tender rage, "Pardon for that man!"

He, in the meantime, had immediately begun to make his descent to rejoin his detachment. In order to reach them the more speedily, he dropped into the rigging, and ran along one of the lower yards; all eyes were following him. At a certain moment fear assailed them; whether it was that he was fatigued, or that his head turned, they thought they saw him hesitate and stagger. All at once the crowd uttered a loud shout: the convict had fallen into the sea.

The fall was perilous. The frigate Algesiras was anchored alongside the Orion, and the poor convict had fallen between the two vessels: it was to be feared that he would slip under one or the other of them. Four men flung themselves hastily into a boat; the crowd cheered them on; anxiety again took possession of all souls; the man had not risen to the surface; he had disappeared in the sea without leaving a ripple, as though he had fallen into a cask of oil: they sounded, they dived. In vain. The search was continued until the evening: they did not even find the body.

On the following day the Toulon newspaper printed these lines:—

"Nov. 17, 1823. Yesterday, a convict belonging to the detachment on board of the Orion, on his return from rendering assistance to a sailor, fell into the sea and was drowned. The body has not yet been found; it is supposed that it is entangled among the piles of the Arsenal point: this man was committed under the number 9,430, and his name was Jean Valjean."

Translation notes

Textual notes

Citations