Volume 1/Book 5/Chapter 13

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Les Misérables, Volume 1: Fantine, Book fifth: The Descent, Chapter 13: The Solution of Some Questions Connected with the Municipal Police
(Tome 1: Fantine, Livre cinqième: La descente, Chapitre 13: Solution de quelques questions de police municipale)

General notes on this chapter[edit]

French text[edit]

Javert écarta les assistants, rompit le cercle et se mit à marcher à grands pas vers le bureau de police qui est à l'extrémité de la place, traînant après lui la misérable. Elle se laissait faire machinalement. Ni lui ni elle ne disaient un mot. La nuée des spectateurs, au paroxysme de la joie, suivait avec des quolibets. La suprême misère, occasion d'obscénités. Arrivé au bureau de police qui était une salle basse chauffée par un poêle et gardée par un poste, avec une porte vitrée et grillée sur la rue, Javert ouvrit la porte, entra avec Fantine, et referma la porte derrière lui, au grand désappointement des curieux qui se haussèrent sur la pointe du pied et allongèrent le cou devant la vitre trouble du corps de garde, cherchant à voir. La curiosité est une gourmandise. Voir, c'est dévorer.

En entrant, la Fantine alla tomber dans un coin, immobile et muette, accroupie comme une chienne qui a peur.

Le sergent du poste apporta une chandelle allumée sur une table. Javert s'assit, tira de sa poche une feuille de papier timbré et se mit à écrire.

Ces classes de femmes sont entièrement remises par nos lois à la discrétion de la police. Elle en fait ce qu'elle veut, les punit comme bon lui semble, et confisque à son gré ces deux tristes choses qu'elles appellent leur industrie et leur liberté. Javert était impassible; son visage sérieux ne trahissait aucune émotion. Pourtant il était gravement et profondément préoccupé. C'était un de ces moments où il exerçait sans contrôle, mais avec tous les scrupules d'une conscience sévère, son redoutable pouvoir discrétionnaire. En cet instant, il le sentait, son escabeau d'agent de police était un tribunal. Il jugeait. Il jugeait, et il condamnait. Il appelait tout ce qu'il pouvait avoir d'idées dans l'esprit autour de la grande chose qu'il faisait. Plus il examinait le fait de cette fille, plus il se sentait révolté. Il était évident qu'il venait de voir commettre un crime. Il venait de voir, là dans la rue, la société, représentée par un propriétaire-électeur, insultée et attaquée par une créature en dehors de tout. Une prostituée avait attenté à un bourgeois. Il avait vu cela, lui Javert. Il écrivait en silence.

Quand il eut fini, il signa, plia le papier et dit au sergent du poste, en le lui remettant:

—Prenez trois hommes, et menez cette fille au bloc.

Puis se tournant vers la Fantine:

—Tu en as pour six mois.

La malheureuse tressaillit.

—Six mois! six mois de prison! Six mois à gagner sept sous par jour! Mais que deviendra Cosette? ma fille! ma fille! Mais je dois encore plus de cent francs aux Thénardier, monsieur l'inspecteur, savez-vous cela?

Elle se traîna sur la dalle mouillée par les bottes boueuses de tous ces hommes, sans se lever, joignant les mains, faisant de grands pas avec ses genoux.

—Monsieur Javert, dit-elle, je vous demande grâce. Je vous assure que je n'ai pas eu tort. Si vous aviez vu le commencement, vous auriez vu! je vous jure le bon Dieu que je n'ai pas eu tort. C'est ce monsieur le bourgeois que je ne connais pas qui m'a mis de la neige dans le dos. Est-ce qu'on a le droit de nous mettre de la neige dans le dos quand nous passons comme cela tranquillement sans faire de mal à personne? Cela m'a saisie. Je suis un peu malade, voyez-vous! Et puis il y avait déjà un peu de temps qu'il me disait des raisons. Tu es laide! tu n'as pas de dents! Je le sais bien que je n'ai plus mes dents. Je ne faisais rien, moi; je disais: c'est un monsieur qui s'amuse. J'étais honnête avec lui, je ne lui parlais pas. C'est à cet instant-là qu'il m'a mis de la neige. Monsieur Javert, mon bon monsieur l'inspecteur! est-ce qu'il n'y a personne là qui ait vu pour vous dire que c'est bien vrai? J'ai peut-être eu tort de me fâcher. Vous savez, dans le premier moment, on n'est pas maître. On a des vivacités. Et puis, quelque chose de si froid qu'on vous met dans le dos à l'heure que vous ne vous y attendez pas! J'ai eu tort d'abîmer le chapeau de ce monsieur. Pourquoi s'est-il en allé? Je lui demanderais pardon. Oh! mon Dieu, cela me serait bien égal de lui demander pardon. Faites-moi grâce pour aujourd'hui cette fois, monsieur Javert. Tenez, vous ne savez pas ça, dans les prisons on ne gagne que sept sous, ce n'est pas la faute du gouvernement, mais on gagne sept sous, et figurez-vous que j'ai cent francs à payer, ou autrement on me renverra ma petite. Ô mon Dieu! je ne peux pas l'avoir avec moi. C'est si vilain ce que je fais! Ô ma Cosette, ô mon petit ange de la bonne sainte Vierge, qu'est-ce qu'elle deviendra, pauvre loup! Je vais vous dire, c'est les Thénardier, des aubergistes, des paysans, ça n'a pas de raisonnement. Il leur faut de l'argent. Ne me mettez pas en prison! Voyez-vous, c'est une petite qu'on mettrait à même sur la grande route, va comme tu pourras, en plein cœur d'hiver, il faut avoir pitié de cette chose-là, mon bon monsieur Javert. Si c'était plus grand, ça gagnerait sa vie, mais ça ne peut pas, à ces âges-là. Je ne suis pas une mauvaise femme au fond. Ce n'est pas la lâcheté et la gourmandise qui ont fait de moi ça. J'ai bu de l'eau-de-vie, c'est par misère. Je ne l'aime pas, mais cela étourdit. Quand j'étais plus heureuse, on n'aurait eu qu'à regarder dans mes armoires, on aurait bien vu que je n'étais pas une femme coquette qui a du désordre. J'avais du linge, beaucoup de linge. Ayez pitié de moi, monsieur Javert!

Elle parlait ainsi, brisée en deux, secouée par les sanglots, aveuglée par les larmes, la gorge nue, se tordant les mains, toussant d'une toux sèche et courte, balbutiant tout doucement avec la voix de l'agonie. La grande douleur est un rayon divin et terrible qui transfigure les misérables. À ce moment-là, la Fantine était redevenue belle. À de certains instants, elle s'arrêtait et baisait tendrement le bas de la redingote du mouchard. Elle eût attendri un cœur de granit, mais on n'attendrit pas un cœur de bois.

—Allons! dit Javert, je t'ai écoutée. As-tu bien tout dit? Marche à présent! Tu as tes six mois; le Père éternel en personne n'y pourrait plus rien.

À cette solennelle parole, Le Père éternel en personne n'y pourrait plus rien, elle comprit que l'arrêt était prononcé. Elle s'affaissa sur elle-même en murmurant:

—Grâce!

Javert tourna le dos.

Les soldats la saisirent par les bras.

Depuis quelques minutes, un homme était entré sans qu'on eût pris garde à lui. Il avait refermé la porte, s'y était adossé, et avait entendu les prières désespérées de la Fantine. Au moment où les soldats mirent la main sur la malheureuse, qui ne voulait pas se lever, il fit un pas, sortit de l'ombre, et dit:

—Un instant, s'il vous plaît!

Javert leva les yeux et reconnut M. Madeleine. Il ôta son chapeau, et saluant avec une sorte de gaucherie fâchée:

—Pardon, monsieur le maire....

Ce mot, monsieur le maire, fit sur la Fantine un effet étrange. Elle se dressa debout tout d'une pièce comme un spectre qui sort de terre, repoussa les soldats des deux bras, marcha droit à M. Madeleine avant qu'on eût pu la retenir, et le regardant fixement, l'air égaré, elle cria:

—Ah! c'est donc toi qui es monsieur le maire!

Puis elle éclata de rire et lui cracha au visage.

M. Madeleine s'essuya le visage, et dit:

—Inspecteur Javert, mettez cette femme en liberté.

Javert se sentit au moment de devenir fou. Il éprouvait en cet instant, coup sur coup, et presque mêlées ensemble, les plus violentes émotions qu'il eût ressenties de sa vie. Voir une fille publique cracher au visage d'un maire, cela était une chose si monstrueuse que, dans ses suppositions les plus effroyables, il eût regardé comme un sacrilège de le croire possible. D'un autre côté, dans le fond de sa pensée, il faisait confusément un rapprochement hideux entre ce qu'était cette femme et ce que pouvait être ce maire, et alors il entrevoyait avec horreur je ne sais quoi de tout simple dans ce prodigieux attentat. Mais quand il vit ce maire, ce magistrat, s'essuyer tranquillement le visage et dire: mettez cette femme en liberté, il eut comme un éblouissement de stupeur; la pensée et la parole lui manquèrent également; la somme de l'étonnement possible était dépassée pour lui. Il resta muet.

Ce mot n'avait pas porté un coup moins étrange à la Fantine. Elle leva son bras nu et se cramponna à la clef du poêle comme une personne qui chancelle. Cependant elle regardait tout autour d'elle et elle se mit à parler à voix basse, comme si elle se parlait à elle-même.

—En liberté! qu'on me laisse aller! que je n'aille pas en prison six mois! Qui est-ce qui a dit cela? Il n'est pas possible qu'on ait dit cela. J'ai mal entendu. Ça ne peut pas être ce monstre de maire! Est-ce que c'est vous, mon bon monsieur Javert, qui avez dit qu'on me mette en liberté? Oh! voyez-vous! je vais vous dire et vous me laisserez aller. Ce monstre de maire, ce vieux gredin de maire, c'est lui qui est cause de tout. Figurez-vous, monsieur Javert, qu'il m'a chassée! à cause d'un tas de gueuses qui tiennent des propos dans l'atelier. Si ce n'est pas là une horreur! renvoyer une pauvre fille qui fait honnêtement son ouvrage! Alors je n'ai plus gagné assez, et tout le malheur est venu. D'abord il y a une amélioration que ces messieurs de la police devraient bien faire, ce serait d'empêcher les entrepreneurs des prisons de faire du tort aux pauvres gens. Je vais vous expliquer cela, voyez-vous. Vous gagnez douze sous dans les chemises, cela tombe à neuf sous, il n'y a plus moyen de vivre. Il faut donc devenir ce qu'on peut. Moi, j'avais ma petite Cosette, j'ai bien été forcée de devenir une mauvaise femme. Vous comprenez à présent, que c'est ce gueux de maire qui a tout fait le mal. Après cela, j'ai piétiné le chapeau de ce monsieur bourgeois devant le café des officiers. Mais lui, il m'avait perdu toute ma robe avec sa neige. Nous autres, nous n'avons qu'une robe de soie, pour le soir. Voyez-vous, je n'ai jamais fait de mal exprès, vrai, monsieur Javert, et je vois partout des femmes bien plus méchantes que moi qui sont bien plus heureuses. Ô monsieur Javert, c'est vous qui avez dit qu'on me mette dehors, n'est-ce pas? Prenez des informations, parlez à mon propriétaire, maintenant je paye mon terme, on vous dira bien que je suis honnête. Ah! mon Dieu, je vous demande pardon, j'ai touché, sans faire attention, à la clef du poêle, et cela fait fumer.

M. Madeleine l'écoutait avec une attention profonde. Pendant qu'elle parlait, il avait fouillé dans son gilet, en avait tiré sa bourse et l'avait ouverte. Elle était vide. Il l'avait remise dans sa poche. Il dit à la Fantine:

—Combien avez-vous dit que vous deviez?

La Fantine, qui ne regardait que Javert, se retourna de son côté:

—Est-ce que je te parle à toi!

Puis s'adressant aux soldats:

—Dites donc, vous autres, avez-vous vu comme je te vous lui ai craché à la figure? Ah! vieux scélérat de maire, tu viens ici pour me faire peur, mais je n'ai pas peur de toi. J'ai peur de monsieur Javert. J'ai peur de mon bon monsieur Javert!

En parlant ainsi elle se retourna vers l'inspecteur:

—Avec ça, voyez-vous, monsieur l'inspecteur, il faut être juste. Je comprends que vous êtes juste, monsieur l'inspecteur. Au fait, c'est tout simple, un homme qui joue à mettre un peu de neige dans le dos d'une femme, ça les faisait rire, les officiers, il faut bien qu'on se divertisse à quelque chose, nous autres nous sommes là pour qu'on s'amuse, quoi! Et puis, vous, vous venez, vous êtes bien forcé de mettre l'ordre, vous emmenez la femme qui a tort, mais en y réfléchissant, comme vous êtes bon, vous dites qu'on me mette en liberté, c'est pour la petite, parce que six mois en prison, cela m'empêcherait de nourrir mon enfant. Seulement n'y reviens plus, coquine! Oh! je n'y reviendrai plus, monsieur Javert! on me fera tout ce qu'on voudra maintenant, je ne bougerai plus. Seulement, aujourd'hui, voyez-vous, j'ai crié parce que cela m'a fait mal, je ne m'attendais pas du tout à cette neige de ce monsieur, et puis, je vous ai dit, je ne me porte pas très bien, je tousse, j'ai là dans l'estomac comme une boule qui me brûle, que le médecin me dit: soignez-vous. Tenez, tâtez, donnez votre main, n'ayez pas peur, c'est ici.

Elle ne pleurait plus, sa voix était caressante, elle appuyait sur sa gorge blanche et délicate la grosse main rude de Javert, et elle le regardait en souriant.

Tout à coup elle rajusta vivement le désordre de ses vêtements, fit retomber les plis de sa robe qui en se traînant s'était relevée presque à la hauteur du genou, et marcha vers la porte en disant à demi-voix aux soldats avec un signe de tête amical:

—Les enfants, monsieur l'inspecteur a dit qu'on me lâche, je m'en vas.

Elle mit la main sur le loquet. Un pas de plus, elle était dans la rue.

Javert jusqu'à cet instant était resté debout, immobile, l'œil fixé à terre, posé de travers au milieu de cette scène comme une statue dérangée qui attend qu'on la mette quelque part.

Le bruit que fit le loquet le réveilla. Il releva la tête avec une expression d'autorité souveraine, expression toujours d'autant plus effrayante que le pouvoir se trouve placé plus bas, féroce chez la bête fauve, atroce chez l'homme de rien.

—Sergent, cria-t-il, vous ne voyez pas que cette drôlesse s'en va! Qui est-ce qui vous a dit de la laisser aller?

—Moi, dit Madeleine.

La Fantine à la voix de Javert avait tremblé et lâché le loquet comme un voleur pris lâche l'objet volé. À la voix de Madeleine, elle se retourna, et à partir de ce moment, sans qu'elle prononçât un mot, sans qu'elle osât même laisser sortir son souffle librement, son regard alla tour à tour de Madeleine à Javert et de Javert à Madeleine, selon que c'était l'un ou l'autre qui parlait.

Il était évident qu'il fallait que Javert eût été, comme on dit, «jeté hors des gonds» pour qu'il se fût permis d'apostropher le sergent comme il l'avait fait, après l'invitation du maire de mettre Fantine en liberté. En était-il venu à oublier la présence de monsieur le maire? Avait-il fini par se déclarer à lui-même qu'il était impossible qu'une «autorité» eût donné un pareil ordre, et que bien certainement monsieur le maire avait dû dire sans le vouloir une chose pour une autre? Ou bien, devant les énormités dont il était témoin depuis deux heures, se disait-il qu'il fallait revenir aux suprêmes résolutions, qu'il était nécessaire que le petit se fit grand, que le mouchard se transformât en magistrat, que l'homme de police devînt homme de justice, et qu'en cette extrémité prodigieuse l'ordre, la loi, la morale, le gouvernement, la société tout entière, se personnifiaient en lui Javert?

Quoi qu'il en soit, quand M. Madeleine eut dit ce moi qu'on vient d'entendre, on vit l'inspecteur de police Javert se tourner vers monsieur le maire, pâle, froid, les lèvres bleues, le regard désespéré, tout le corps agité d'un tremblement imperceptible, et, chose inouïe, lui dire, l'œil baissé, mais la voix ferme:

—Monsieur le maire, cela ne se peut pas.

—Comment? dit M. Madeleine.

—Cette malheureuse a insulté un bourgeois.

—Inspecteur Javert, repartit M. Madeleine avec un accent conciliant et calme, écoutez. Vous êtes un honnête homme, et je ne fais nulle difficulté de m'expliquer avec vous. Voici le vrai. Je passais sur la place comme vous emmeniez cette femme, il y avait encore des groupes, je me suis informé, j'ai tout su, c'est le bourgeois qui a eu tort et qui, en bonne police, eût dû être arrêté.

Javert reprit:

—Cette misérable vient d'insulter monsieur le maire.

—Ceci me regarde, dit M. Madeleine. Mon injure est à moi peut-être. J'en puis faire ce que je veux.

—Je demande pardon à monsieur le maire. Son injure n'est pas à lui, elle est à la justice.

—Inspecteur Javert, répliqua M. Madeleine, la première justice, c'est la conscience. J'ai entendu cette femme. Je sais ce que je fais.

—Et moi, monsieur le maire, je ne sais pas ce que je vois.

—Alors contentez-vous d'obéir.

—J'obéis à mon devoir. Mon devoir veut que cette femme fasse six mois de prison.

M. Madeleine répondit avec douceur:

—Écoutez bien ceci. Elle n'en fera pas un jour.

À cette parole décisive, Javert osa regarder le maire fixement, et lui dit, mais avec un son de voix toujours profondément respectueux:

—Je suis au désespoir de résister à monsieur le maire, c'est la première fois de ma vie, mais il daignera me permettre de lui faire observer que je suis dans la limite de mes attributions. Je reste, puisque monsieur le maire le veut, dans le fait du bourgeois. J'étais là. C'est cette fille qui s'est jetée sur monsieur Bamatabois, qui est électeur et propriétaire de cette belle maison à balcon qui fait le coin de l'esplanade, à trois étages et toute en pierre de taille. Enfin, il y a des choses dans ce monde! Quoi qu'il en soit, monsieur le maire, cela, c'est un fait de police de la rue qui me regarde, et je retiens la femme Fantine.

Alors M. Madeleine croisa les bras et dit avec une voix sévère que personne dans la ville n'avait encore entendue:

—Le fait dont vous parlez est un fait de police municipale. Aux termes des articles neuf, onze, quinze et soixante-six du code d'instruction criminelle, j'en suis juge. J'ordonne que cette femme soit mise en liberté.

Javert voulut tenter un dernier effort.

—Mais, monsieur le maire....

—Je vous rappelle, à vous, l'article quatre-vingt-un de la loi du 13 décembre 1799 sur la détention arbitraire.

—Monsieur le maire, permettez....

—Plus un mot.

—Pourtant....

—Sortez, dit M. Madeleine.

Javert reçut le coup, debout, de face, et en pleine poitrine comme un soldat russe. Il salua jusqu'à terre monsieur le maire, et sortit.

Fantine se rangea de la porte et le regarda avec stupeur passer devant elle.

Cependant elle aussi était en proie à un bouleversement étrange. Elle venait de se voir en quelque sorte disputée par deux puissances opposées. Elle avait vu lutter devant ses yeux deux hommes tenant dans leurs mains sa liberté, sa vie, son âme, son enfant; l'un de ces hommes la tirait du côté de l'ombre, l'autre la ramenait vers la lumière. Dans cette lutte, entrevue à travers les grossissements de l'épouvante, ces deux hommes lui étaient apparus comme deux géants; l'un parlait comme son démon, l'autre parlait comme son bon ange. L'ange avait vaincu le démon, et, chose qui la faisait frissonner de la tête aux pieds, cet ange, ce libérateur, c'était précisément l'homme qu'elle abhorrait, ce maire qu'elle avait si longtemps considéré comme l'auteur de tous ses maux, ce Madeleine! et au moment même où elle venait de l'insulter d'une façon hideuse, il la sauvait! S'était-elle donc trompée? Devait-elle donc changer toute son âme?... Elle ne savait, elle tremblait. Elle écoutait éperdue, elle regardait effarée, et à chaque parole que disait M. Madeleine, elle sentait fondre et s'écrouler en elle les affreuses ténèbres de la haine et naître dans son cœur je ne sais quoi de réchauffant et d'ineffable qui était de la joie, de la confiance et de l'amour.

Quand Javert fut sorti, M. Madeleine se tourna vers elle, et lui dit avec une voix lente, ayant peine à parler comme un homme sérieux qui ne veut pas pleurer:

—Je vous ai entendue. Je ne savais rien de ce que vous avez dit. Je crois que c'est vrai, et je sens que c'est vrai. J'ignorais même que vous eussiez quitté mes ateliers. Pourquoi ne vous êtes-vous pas adressée à moi? Mais voici: je payerai vos dettes, je ferai venir votre enfant, ou vous irez la rejoindre. Vous vivrez ici, à Paris, où vous voudrez. Je me charge de votre enfant et de vous. Vous ne travaillerez plus, si vous voulez. Je vous donnerai tout l'argent qu'il vous faudra. Vous redeviendrez honnête en redevenant heureuse. Et même, écoutez, je vous le déclare dès à présent, si tout est comme vous le dites, et je n'en doute pas, vous n'avez jamais cessé d'être vertueuse et sainte devant Dieu. Oh! pauvre femme!

C'en était plus que la pauvre Fantine n'en pouvait supporter. Avoir Cosette! sortir de cette vie infâme! vivre libre, riche, heureuse, honnête, avec Cosette! voir brusquement s'épanouir au milieu de sa misère toutes ces réalités du paradis! Elle regarda comme hébétée cet homme qui lui parlait, et ne put que jeter deux ou trois sanglots: oh! oh! oh! Ses jarrets plièrent, elle se mit à genoux devant M. Madeleine, et, avant qu'il eût pu l'en empêcher, il sentit qu'elle lui prenait la main et que ses lèvres s'y posaient.

Puis elle s'évanouit.

English text[edit]

Javert thrust aside the spectators, broke the circle, and set out with long strides towards the police station, which is situated at the extremity of the square, dragging the wretched woman after him. She yielded mechanically. Neither he nor she uttered a word. The cloud of spectators followed, jesting, in a paroxysm of delight. Supreme misery an occasion for obscenity.

On arriving at the police station, which was a low room, warmed by a stove, with a glazed and grated door opening on the street, and guarded by a detachment, Javert opened the door, entered with Fantine, and shut the door behind him, to the great disappointment of the curious, who raised themselves on tiptoe, and craned their necks in front of the thick glass of the station-house, in their effort to see. Curiosity is a sort of gluttony. To see is to devour.

On entering, Fantine fell down in a corner, motionless and mute, crouching down like a terrified dog.

The sergeant of the guard brought a lighted candle to the table. Javert seated himself, drew a sheet of stamped paper from his pocket, and began to write.

This class of women is consigned by our laws entirely to the discretion of the police. The latter do what they please, punish them, as seems good to them, and confiscate at their will those two sorry things which they entitle their industry and their liberty. Javert was impassive; his grave face betrayed no emotion whatever. Nevertheless, he was seriously and deeply preoccupied. It was one of those moments when he was exercising without control, but subject to all the scruples of a severe conscience, his redoubtable discretionary power. At that moment he was conscious that his police agent's stool was a tribunal. He was entering judgment. He judged and condemned. He summoned all the ideas which could possibly exist in his mind, around the great thing which he was doing. The more he examined the deed of this woman, the more shocked he felt. It was evident that he had just witnessed the commission of a crime. He had just beheld, yonder, in the street, society, in the person of a freeholder and an elector, insulted and attacked by a creature who was outside all pales. A prostitute had made an attempt on the life of a citizen. He had seen that, he, Javert. He wrote in silence.

When he had finished he signed the paper, folded it, and said to the sergeant of the guard, as he handed it to him, "Take three men and conduct this creature to jail."

Then, turning to Fantine, "You are to have six months of it." The unhappy woman shuddered.

"Six months! six months of prison!" she exclaimed. "Six months in which to earn seven sous a day! But what will become of Cosette? My daughter! my daughter! But I still owe the Thenardiers over a hundred francs; do you know that, Monsieur Inspector?"

She dragged herself across the damp floor, among the muddy boots of all those men, without rising, with clasped hands, and taking great strides on her knees.

"Monsieur Javert," said she, "I beseech your mercy. I assure you that I was not in the wrong. If you had seen the beginning, you would have seen. I swear to you by the good God that I was not to blame! That gentleman, the bourgeois, whom I do not know, put snow in my back. Has any one the right to put snow down our backs when we are walking along peaceably, and doing no harm to any one? I am rather ill, as you see. And then, he had been saying impertinent things to me for a long time: 'You are ugly! you have no teeth!' I know well that I have no longer those teeth. I did nothing; I said to myself, 'The gentleman is amusing himself.' I was honest with him; I did not speak to him. It was at that moment that he put the snow down my back. Monsieur Javert, good Monsieur Inspector! is there not some person here who saw it and can tell you that this is quite true? Perhaps I did wrong to get angry. You know that one is not master of one's self at the first moment. One gives way to vivacity; and then, when some one puts something cold down your back just when you are not expecting it! I did wrong to spoil that gentleman's hat. Why did he go away? I would ask his pardon. Oh, my God! It makes no difference to me whether I ask his pardon. Do me the favor to-day, for this once, Monsieur Javert. Hold! you do not know that in prison one can earn only seven sous a day; it is not the government's fault, but seven sous is one's earnings; and just fancy, I must pay one hundred francs, or my little girl will be sent to me. Oh, my God! I cannot have her with me. What I do is so vile! Oh, my Cosette! Oh, my little angel of the Holy Virgin! what will become of her, poor creature? I will tell you: it is the Thenardiers, inn-keepers, peasants; and such people are unreasonable. They want money. Don't put me in prison! You see, there is a little girl who will be turned out into the street to get along as best she may, in the very heart of the winter; and you must have pity on such a being, my good Monsieur Javert. If she were older, she might earn her living; but it cannot be done at that age. I am not a bad woman at bottom. It is not cowardliness and gluttony that have made me what I am. If I have drunk brandy, it was out of misery. I do not love it; but it benumbs the senses. When I was happy, it was only necessary to glance into my closets, and it would have been evident that I was not a coquettish and untidy woman. I had linen, a great deal of linen. Have pity on me, Monsieur Javert!"

She spoke thus, rent in twain, shaken with sobs, blinded with tears, her neck bare, wringing her hands, and coughing with a dry, short cough, stammering softly with a voice of agony. Great sorrow is a divine and terrible ray, which transfigures the unhappy. At that moment Fantine had become beautiful once more. From time to time she paused, and tenderly kissed the police agent's coat. She would have softened a heart of granite; but a heart of wood cannot be softened.

"Come!" said Javert, "I have heard you out. Have you entirely finished? You will get six months. Now march! The Eternal Father in person could do nothing more."

At these solemn words, "the Eternal Father in person could do nothing more," she understood that her fate was sealed. She sank down, murmuring, "Mercy!"

Javert turned his back.

The soldiers seized her by the arms.

A few moments earlier a man had entered, but no one had paid any heed to him. He shut the door, leaned his back against it, and listened to Fantine's despairing supplications.

At the instant when the soldiers laid their hands upon the unfortunate woman, who would not rise, he emerged from the shadow, and said:—

"One moment, if you please."

Javert raised his eyes and recognized M. Madeleine. He removed his hat, and, saluting him with a sort of aggrieved awkwardness:—

"Excuse me, Mr. Mayor—"

The words "Mr. Mayor" produced a curious effect upon Fantine. She rose to her feet with one bound, like a spectre springing from the earth, thrust aside the soldiers with both arms, walked straight up to M. Madeleine before any one could prevent her, and gazing intently at him, with a bewildered air, she cried:—

"Ah! so it is you who are M. le Maire!"

Then she burst into a laugh, and spit in his face.

M. Madeleine wiped his face, and said:—

"Inspector Javert, set this woman at liberty."

Javert felt that he was on the verge of going mad. He experienced at that moment, blow upon blow and almost simultaneously, the most violent emotions which he had ever undergone in all his life. To see a woman of the town spit in the mayor's face was a thing so monstrous that, in his most daring flights of fancy, he would have regarded it as a sacrilege to believe it possible. On the other hand, at the very bottom of his thought, he made a hideous comparison as to what this woman was, and as to what this mayor might be; and then he, with horror, caught a glimpse of I know not what simple explanation of this prodigious attack. But when he beheld that mayor, that magistrate, calmly wipe his face and say, "Set this woman at liberty," he underwent a sort of intoxication of amazement; thought and word failed him equally; the sum total of possible astonishment had been exceeded in his case. He remained mute.

The words had produced no less strange an effect on Fantine. She raised her bare arm, and clung to the damper of the stove, like a person who is reeling. Nevertheless, she glanced about her, and began to speak in a low voice, as though talking to herself:—

"At liberty! I am to be allowed to go! I am not to go to prison for six months! Who said that? It is not possible that any one could have said that. I did not hear aright. It cannot have been that monster of a mayor! Was it you, my good Monsieur Javert, who said that I was to be set free? Oh, see here! I will tell you about it, and you will let me go. That monster of a mayor, that old blackguard of a mayor, is the cause of all. Just imagine, Monsieur Javert, he turned me out! all because of a pack of rascally women, who gossip in the workroom. If that is not a horror, what is? To dismiss a poor girl who is doing her work honestly! Then I could no longer earn enough, and all this misery followed. In the first place, there is one improvement which these gentlemen of the police ought to make, and that is, to prevent prison contractors from wronging poor people. I will explain it to you, you see: you are earning twelve sous at shirt-making, the price falls to nine sous; and it is not enough to live on. Then one has to become whatever one can. As for me, I had my little Cosette, and I was actually forced to become a bad woman. Now you understand how it is that that blackguard of a mayor caused all the mischief. After that I stamped on that gentleman's hat in front of the officers' cafe; but he had spoiled my whole dress with snow. We women have but one silk dress for evening wear. You see that I did not do wrong deliberately—truly, Monsieur Javert; and everywhere I behold women who are far more wicked than I, and who are much happier. O Monsieur Javert! it was you who gave orders that I am to be set free, was it not? Make inquiries, speak to my landlord; I am paying my rent now; they will tell you that I am perfectly honest. Ah! my God! I beg your pardon; I have unintentionally touched the damper of the stove, and it has made it smoke."

M. Madeleine listened to her with profound attention. While she was speaking, he fumbled in his waistcoat, drew out his purse and opened it. It was empty. He put it back in his pocket. He said to Fantine, "How much did you say that you owed?"

Fantine, who was looking at Javert only, turned towards him:—

"Was I speaking to you?"

Then, addressing the soldiers:—

"Say, you fellows, did you see how I spit in his face? Ah! you old wretch of a mayor, you came here to frighten me, but I'm not afraid of you. I am afraid of Monsieur Javert. I am afraid of my good Monsieur Javert!"

So saying, she turned to the inspector again:—

"And yet, you see, Mr. Inspector, it is necessary to be just. I understand that you are just, Mr. Inspector; in fact, it is perfectly simple: a man amuses himself by putting snow down a woman's back, and that makes the officers laugh; one must divert themselves in some way; and we—well, we are here for them to amuse themselves with, of course! And then, you, you come; you are certainly obliged to preserve order, you lead off the woman who is in the wrong; but on reflection, since you are a good man, you say that I am to be set at liberty; it is for the sake of the little one, for six months in prison would prevent my supporting my child. 'Only, don't do it again, you hussy!' Oh! I won't do it again, Monsieur Javert! They may do whatever they please to me now; I will not stir. But to-day, you see, I cried because it hurt me. I was not expecting that snow from the gentleman at all; and then as I told you, I am not well; I have a cough; I seem to have a burning ball in my stomach, and the doctor tells me, 'Take care of yourself.' Here, feel, give me your hand; don't be afraid—it is here."

She no longer wept, her voice was caressing; she placed Javert's coarse hand on her delicate, white throat and looked smilingly at him.

All at once she rapidly adjusted her disordered garments, dropped the folds of her skirt, which had been pushed up as she dragged herself along, almost to the height of her knee, and stepped towards the door, saying to the soldiers in a low voice, and with a friendly nod:—

"Children, Monsieur l'Inspecteur has said that I am to be released, and I am going."

She laid her hand on the latch of the door. One step more and she would be in the street.

Javert up to that moment had remained erect, motionless, with his eyes fixed on the ground, cast athwart this scene like some displaced statue, which is waiting to be put away somewhere.

The sound of the latch roused him. He raised his head with an expression of sovereign authority, an expression all the more alarming in proportion as the authority rests on a low level, ferocious in the wild beast, atrocious in the man of no estate.

"Sergeant!" he cried, "don't you see that that jade is walking off! Who bade you let her go?"

"I," said Madeleine.

Fantine trembled at the sound of Javert's voice, and let go of the latch as a thief relinquishes the article which he has stolen. At the sound of Madeleine's voice she turned around, and from that moment forth she uttered no word, nor dared so much as to breathe freely, but her glance strayed from Madeleine to Javert, and from Javert to Madeleine in turn, according to which was speaking.

It was evident that Javert must have been exasperated beyond measure before he would permit himself to apostrophize the sergeant as he had done, after the mayor's suggestion that Fantine should be set at liberty. Had he reached the point of forgetting the mayor's presence? Had he finally declared to himself that it was impossible that any "authority" should have given such an order, and that the mayor must certainly have said one thing by mistake for another, without intending it? Or, in view of the enormities of which he had been a witness for the past two hours, did he say to himself, that it was necessary to recur to supreme resolutions, that it was indispensable that the small should be made great, that the police spy should transform himself into a magistrate, that the policeman should become a dispenser of justice, and that, in this prodigious extremity, order, law, morality, government, society in its entirety, was personified in him, Javert?

However that may be, when M. Madeleine uttered that word, I, as we have just heard, Police Inspector Javert was seen to turn toward the mayor, pale, cold, with blue lips, and a look of despair, his whole body agitated by an imperceptible quiver and an unprecedented occurrence, and say to him, with downcast eyes but a firm voice:—

"Mr. Mayor, that cannot be."

"Why not?" said M. Madeleine.

"This miserable woman has insulted a citizen."

"Inspector Javert," replied the mayor, in a calm and conciliating tone, "listen. You are an honest man, and I feel no hesitation in explaining matters to you. Here is the true state of the case: I was passing through the square just as you were leading this woman away; there were still groups of people standing about, and I made inquiries and learned everything; it was the townsman who was in the wrong and who should have been arrested by properly conducted police."

Javert retorted:—

"This wretch has just insulted Monsieur le Maire."

"That concerns me," said M. Madeleine. "My own insult belongs to me, I think. I can do what I please about it."

"I beg Monsieur le Maire's pardon. The insult is not to him but to the law."

"Inspector Javert," replied M. Madeleine, "the highest law is conscience. I have heard this woman; I know what I am doing."

"And I, Mr. Mayor, do not know what I see."

"Then content yourself with obeying."

"I am obeying my duty. My duty demands that this woman shall serve six months in prison."

M. Madeleine replied gently:—

"Heed this well; she will not serve a single day."

At this decisive word, Javert ventured to fix a searching look on the mayor and to say, but in a tone of voice that was still profoundly respectful:—

"I am sorry to oppose Monsieur le Maire; it is for the first time in my life, but he will permit me to remark that I am within the bounds of my authority. I confine myself, since Monsieur le Maire desires it, to the question of the gentleman. I was present. This woman flung herself on Monsieur Bamatabnois, who is an elector and the proprietor of that handsome house with a balcony, which forms the corner of the esplanade, three stories high and entirely of cut stone. Such things as there are in the world! In any case, Monsieur le Maire, this is a question of police regulations in the streets, and concerns me, and I shall detain this woman Fantine."

Then M. Madeleine folded his arms, and said in a severe voice which no one in the town had heard hitherto:—

"The matter to which you refer is one connected with the municipal police. According to the terms of articles nine, eleven, fifteen, and sixty-six of the code of criminal examination, I am the judge. I order that this woman shall be set at liberty."

Javert ventured to make a final effort.

"But, Mr. Mayor—"

"I refer you to article eighty-one of the law of the 13th of December, 1799, in regard to arbitrary detention."

"Monsieur le Maire, permit me—"

"Not another word."

"But—"

"Leave the room," said M. Madeleine.

Javert received the blow erect, full in the face, in his breast, like a Russian soldier. He bowed to the very earth before the mayor and left the room.

Fantine stood aside from the door and stared at him in amazement as he passed.

Nevertheless, she also was the prey to a strange confusion. She had just seen herself a subject of dispute between two opposing powers. She had seen two men who held in their hands her liberty, her life, her soul, her child, in combat before her very eyes; one of these men was drawing her towards darkness, the other was leading her back towards the light. In this conflict, viewed through the exaggerations of terror, these two men had appeared to her like two giants; the one spoke like her demon, the other like her good angel. The angel had conquered the demon, and, strange to say, that which made her shudder from head to foot was the fact that this angel, this liberator, was the very man whom she abhorred, that mayor whom she had so long regarded as the author of all her woes, that Madeleine! And at the very moment when she had insulted him in so hideous a fashion, he had saved her! Had she, then, been mistaken? Must she change her whole soul? She did not know; she trembled. She listened in bewilderment, she looked on in affright, and at every word uttered by M. Madeleine she felt the frightful shades of hatred crumble and melt within her, and something warm and ineffable, indescribable, which was both joy, confidence and love, dawn in her heart.

When Javert had taken his departure, M. Madeleine turned to her and said to her in a deliberate voice, like a serious man who does not wish to weep and who finds some difficulty in speaking:—

"I have heard you. I knew nothing about what you have mentioned. I believe that it is true, and I feel that it is true. I was even ignorant of the fact that you had left my shop. Why did you not apply to me? But here; I will pay your debts, I will send for your child, or you shall go to her. You shall live here, in Paris, or where you please. I undertake the care of your child and yourself. You shall not work any longer if you do not like. I will give all the money you require. You shall be honest and happy once more. And listen! I declare to you that if all is as you say,—and I do not doubt it,—you have never ceased to be virtuous and holy in the sight of God. Oh! poor woman."

This was more than Fantine could bear. To have Cosette! To leave this life of infamy. To live free, rich, happy, respectable with Cosette; to see all these realities of paradise blossom of a sudden in the midst of her misery. She stared stupidly at this man who was talking to her, and could only give vent to two or three sobs, "Oh! Oh! Oh!"

Her limbs gave way beneath her, she knelt in front of M. Madeleine, and before he could prevent her he felt her grasp his hand and press her lips to it.

Then she fainted.

Translation notes[edit]

Textual notes[edit]

Citations[edit]